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POUR L’INDE, LA RUSSIE EST UN INVESTISSEMENT A LONG TERME. Olivier DA LAGE
LA CHINE ET L’ARCTIQUE. Thierry GARCIN
L’ESPACE, OUTIL GÉOPOLITIQUE JURIDIQUEMENT CONTESTÉ. Quentin GUEHO
TRIBUNE - FACE À UNE CHINE BÉLLIQUEUSE, LE JAPON JOUE LA CARTE DU RÉARMEMENT. Pierre-Antoine DONNET
DU DROIT DE LA GUERRE DANS LE CONFLIT ARMÉ RUSSO-UKRAINIEN. David CUMIN
ENTRETIEN EXCLUSIF AVEC EMMANUEL LINCOT sur la Chine et l’Asie centrale. « LE TRÈS GRAND JEU »
ENTRETIEN EXCLUSIF - LE MULTILATERALISME AU PRISME DE NATIONS DESUNIES. Julian FERNANDEZ
L’AFRIQUE ET LA CHINE : UNE ASYMÉTRIE SINO-CENTRÉE ? Thierry PAIRAULT
L’INDO-PACIFIQUE : UN CONCEPT FORT DISCUTABLE ! Thierry GARCIN
L’ALLIANCE CHIP4 EST-ELLE NÉE OBSOLÈTE ? Yohan BRIANT
BRETTON WOODS ET LE SOMMET DU MONDE. Jean-Marc Siroën
LES ENJEUX DE SÉCURITE DE L’INDE EN ASIE DU SUD. Olivier DA LAGE
LA CULTURE COMME ENJEU SÉCURITAIRE. Barthélémy COURMONT
L’ARCTIQUE ET LA GUERRE D’UKRAINE. Par Thierry GARCIN
LA REVANCHE DE LA (GEO)POLITIQUE SUR L’ECONOMIQUE
UKRAINE. CRISE, RETOUR HISTORIQUE ET SOLUTION ACTUELLE : « LA NEUTRALISATION ». Par David CUMIN
VLADIMIR POUTINE : LA FIN D’UN RÈGNE ? Par Galia ACKERMAN
« LA RUSE ET LA FORCE AU CŒUR DES RELATIONS INTERNATIONALES CONTEMPORAINES »
L’INTER-SOCIALITE AU COEUR DES DYNAMIQUES ACTUELLES DES RELATIONS INTERNATIONALES
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PROCHE-ORIENT. 7 OCTOBRE : UN AN APRÈS… Ph. Mocellin et Ph. Mottet
Poids d’une longue histoire. De la création de l’État d’Israël au 7 octobre. Retombées géopolitiques. Position des acteurs et problématique territoriale : solution à deux Etats, coexistence pacifique...
samedi 5 octobre 2024 Philippe MOCELLIN, Philippe MOTTET
Philippe MOCELLIN [1] et Philippe MOTTET [2], co-auteurs d’ouvrages et d’articles [3], proposent de revenir un an après, sur le triste anniversaire du 7 octobre, dans une perspective longue en convoquant l’histoire dans un contexte systémique : territoires en ruine, dégâts humains majeurs, E.U tétanisés par les élections présidentielles, silence assourdissant de l’UE, escalade et désagrégation régionale… Le tableau est terrifiant, traduisant un nouveau recul du droit international et l’absence de toute régulation par les Organisations internationales. Le niveau actuel de la violence au Proche-Orient traduit à la fois la désorganisation de l’ordre géopolitique (élections américaines etc...) et la « neutralisation » des grandes organisations (ONU…).
Ces dernières années, la brutalisation des relations internationales et la remise en cause du droit international, aussi imparfait était-il, produisent un ensauvagement mondial et une dynamique de décivilisation pour Josepha Laroche [4]. Cette évolution dramatique conduit à des tragédies humaines sans nom. Derrière les échanges médiatiques des chiffres funèbres du nombre de victimes, hors de tout relativisme, Israël est pris dans une dualité infernale (légitimité de la réplique/ morts civils). La question de la réplique et de son ampleur est centrale. Il y a des deux côtés une instrumentalisation à l’extrême du conflit. Les intérêts vitaux des populations israéliennes et palestiniennes disparaissent au profit du calcul des dirigeants (Vincent Lemire) [5], y compris avec le sujet des bipers (Amélie Ferey).
Pierre Haski, dans l’une de ses chroniques, écrit que la Palestine est sans voix. « Les Palestiniens sont orphelins de leaders politiques légitimes. Ils sont au cœur de la tragédie proche-orientale mais on ne les entend pas ». Le sort réservé aux Gazaouis est finalement le reflet de ces lignes de fracture et le prix à payer par les franges les plus faibles ou marginalisées au sens politique du terme ». Les Etats arabes jouent les intérêts nationaux. Jean-Paul Chagnollaud [6] évoque les trois niveaux dégradés de saisie du conflit : droit international humanitaire piétiné, diplomatie impuissante, force et guerre sans fin. La guerre sans fin écrase la question palestinienne et la condamnation de la colonisation par la CIJ.
PROCHE-ORIENT. 7 OCTOBRE : UN AN APRES… Résumé
On pourra consulter à titre d’approfondissement, sous la signature des deux auteurs, l’ensemble des notes et références académiques.
Il demeure bien périlleux de se pencher, depuis la tragédie du 7 octobre 2023, sur l’avenir du Proche-Orient. Et pourtant, un an après ces événements si déchirants, un regard global s’impose sur cette partie du monde, marquée par les traumatismes d’une douleur perpétuelle, les souffrances humaines et plongée dans une incertitude sans fin…, sur fond de haine et d’actes antisémites, sans précédent au XXIe siècle.
Cette agression odieuse du Hamas contre des civils israéliens a engendré une riposte militaire légitime de l’Etat hébreu. La bande de Gaza est, depuis un an, la cible régulière de l’armée israélienne, visant des quartiers, certains lieux publics ou des établissements divers, qui abritent, selon les services de renseignements, de nombreuses « cellules » terroristes… Autant d’enchaînements guerriers, non sans effet, du fait même de la pression internationale et de la situation humanitaire, sur la géopolitique de la région, la configuration des rapports de force et la stabilité du Liban, du Golfe et de la mer Rouge…
Et alors que le risque d’embrasement généralisé n’a jamais été aussi élevé, après la décision de l’Iran d’en découdre avec Israël, par l’envoi, le 1er octobre, d’une « pluie de missiles » balistiques sur Beer Sheva, Jérusalem, Tel-Aviv et dans les colonies de Cisjordanie.
La « réponse » de l’Etat hébreu à ces tirs iraniens, fera, sans doute, entrer le Moyen-Orient dans une autre phase du conflit, dont il conviendra d’apprécier, à terme, toutes les conséquences.
Cette nouvelle donne est d’abord le fruit d’une évolution progressive du conflit au travers de différents fronts, dont celui ouvert par le Hezbollah, mouvement chiite pro-iranien, responsable de frappes meurtrières, notamment sur le plateau du Golan, au nord d’Israël et sur le long de la frontière avec le Liban.
Autant d’attaques de soutien à Gaza, également appuyées par les drones téléguidés par les Houthis du Yémen, qui ont motivé Tsahal, à lancer de nouvelles « offensives », notamment, en direction du sud Liban.
A savoir, l’élimination du chef militaire du Hezbollah, Fouad Chok ainsi que celle, sur le sol iranien, le 31 juillet dernier, du « visage » du Hamas, Ismaïl Haniyeh, et également, cette opération, sans précédent, ayant provoqué l’explosion simultanée des bipeurs et des talkies-walkies, utilisés par l’organisation islamiste (1) .
Et enfin, l’intensification des bombardements aériens de l’armée israélienne dans la plaine de la Bekaa et la banlieue sud de Beyrouth, où a été tué, le 27 septembre, le numéro un Hezbollah, Hassan NASRALLAH (2).
Aussi, avant d’analyser, à l’aune de l’engagement des grandes puissances et de l’implication des acteurs régionaux, l’onde de choc géopolitique que ce conflit actuel représente au Proche-Orient, il s’avère opportun de revenir sur la longue histoire « israélo-palestinienne », reflet d’un antagonisme profond, tant religieux que territorial…
Au-delà de l’appréciation géopolitique du conflit, nous tenterons également, sans occulter les enseignements des échecs successifs du passé dans la résolution du conflit israélo-arabe, de cerner les contours possibles d’une « sortie » de crise, telle que pensée ou imaginée…
La solution à « deux Etats », voie de « coexistence » pacifique supposant une adhésion des deux peuples concernés, fait partie de ce scénario qu’un grand nombre de dirigeants de la planète ainsi que l’ONU ont réactivé, au lendemain des massacres du 7 octobre.
7 OCTOBRE : UN AN APRÈS
Difficile, dans ce contexte de crise aigüe, de procéder à une introspection géopolitique du conflit en cours, sans évoquer les origines profondes de celui-ci, qui oppose aujourd’hui l’Etat d’Israël avec diverses organisations, à l’instar du Hamas et du Hezbollah, « axe » guerrier, instrumentalisant, pour une part au moins, la « question » palestinienne et par ailleurs, avec le monde arabe, en fonction des aléas diplomatiques…
Cette exigence est ainsi rappelée par Georges BENSOUSSAN (3) indiquant, au demeurant, que le conflit, dit « israélo-arabe », commenté pourtant à longueur de médias, est finalement « mal connu ». C’est en effet après la première guerre mondiale et à l’issue d’une très longue histoire qu’un affrontement, sans concession, éclatera entre deux projets nationalistes - en l’occurrence juif et arabe - amplifié par des oppositions religieuses (judaïsme contre islam). Il nous faut cependant remonter à la seconde moitié du XIXe siècle, pour bien appréhender « ce qui joue », entre les discours dominants des élites arabes, ceux tenus par la communauté séfarade et aussi au sein des sionistes d’Europe orientale.
Le poids d’une longue histoire…
Pour rappel, si le terme « Palestina » (4) est inventé par Hérodote, au IVe siècle avant notre ère, « ce n’est qu’en 138 de notre ère que le mot réapparaît après la répression sanglante de la dernière grande révolte juive menée par Bar KOCHBA ». C’est à la même époque que l’empereur HADRIEN débaptise Jérusalem et alors qu’au cours des siècles qui suivent, ce territoire, ou la présence juive perdure, continuera à se nommer « terre d’Israël », devenu ensuite, « terre sainte », dénomination consacrée par l’Occident.
Au début du XIXe siècle, la Palestine n’est d’ailleurs pas distincte de la Syrie (englobant les Etats actuels du Liban, de Jordanie et d’Israël) et demeure « éclatée jusqu’en 1918 entre plusieurs sous-divisions, sous la souveraineté ottomane ». Et alors que sur la base du code foncier ottoman de 1858, ayant favorisé la constitution de propriétés foncières, près de 70 000 immigrants juifs s’installeront en Palestine (5) entre 1881 et 1914.
Et pourtant, tout au long du XIXe siècle et jusqu’au démantèlement définitif de l’empire Ottoman, ayant conforté le « nationalisme arabe », les juifs demeureront dans une situation d’infériorité et de précarité (6). En cette « terre sainte », l’islam « balance entre le rejet et la reconnaissance des droits des juifs » (7). Pour cerner cependant ce que représente cette « terre sainte » pour les juifs, il est nécessaire d’intégrer les idéaux d’un autre nationalisme : le sionisme, en référence au manifeste de 1896 et tel que théorisé par Theodor HERZL.
A la suite de lettre ouverte d’Arthur BALFOUR, secrétaire d’Etat Britannique aux Affaires Etrangères, adressé au Lord Lionel Walter ROTHSCHILD, leader du mouvement sioniste, émerge l’idée de l’établissement d’un « foyer national pour le peuple juif » en Palestine, partie prenant de « l’ex-empire » Ottoman.
Dans le même temps, « les britanniques et les français promettent aux peuples arabes des terres et l’indépendance en échange de leur rébellion contre l’Empire ottoman » (8). Les accords Sykes-Picot de 1916 mettront fin à cette perspective, en partageant les possessions ottomanes au Moyen-Orient, entre une zone française au nord et une zone britannique au sud.
Autant dire que toutes ces promesses non tenues ne pouvaient que nourrir rancœur et frustration…
A partir de 1920, la Palestine est sous mandat britannique et alors qu’entre 1917 (date de la déclaration de BALFOUR) et 1948 (création, le 14 mai de cette année, de l’Etat d’Israël, conséquence de l’Holocauste nazie), la population juive passe de 70 000 à 650 000.
De la création de l’Etat d’Israël….
Si en 1947, la résolution 181 de l’ONU entérine, en dépit de l’opposition des pays arabes, le plan de partage de la Palestine en trois secteurs (arabe, juif et Jérusalem sous tutelle onusienne), éclate, dès 1948, le premier conflit israélo-arabe contemporain.
Ainsi et à l’issue de cette guerre dite « d’indépendance », l’Etat Juif récupère alors 78% du territoire, le reste est annexé par la Jordanie (Cisjordanie) et l’Egypte (bande de Gaza) : un résultat, considéré par les Palestiniens, comme une catastrophe (la « Nakba »), ayant d’ailleurs pour conséquence la fuite de populations.
700 000 arabes palestiniens quittent les régions incluses dans l’Etat juif et alors que la Jordanie annexe la Cisjordanie et Jérusalem-Ouest et l’Egypte, la bande de Gaza.
En 1964, est créée l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) et avec à sa tête, Yasser ARAFAT, visant à représenter le peuple palestinien et à entreprendre la « résistance » contre Israël. La « charte » de l’OLP, adoptée en 1968, stipule « qu’un palestinien est à la fois un habitant ou ex-habitant de la Palestine d’avant 1947 ». Si ce même texte indique que les juifs pourront aussi accéder à la citoyenneté dans cet Etat, elle ne sera néanmoins réservée qu’aux seules personnes de confession juive, « résidant en Palestine avant l’invasion sioniste » : implicitement, cela « implique que les populations ayant immigré depuis la fin du XIXe siècle, seraient alors « expulsées de Palestine… » (9).
De cette nouvelle donne internationale, en découlera des relations « israélo-arabes » exacerbées, marquées par les conflits ouverts, les revirements diplomatiques et les espoirs déçus… Rappelons ici quelques « dates-clé », sans prétendre à l’exhaustivité :
- la guerre des « Six Jours » de 1967, consacrant la victoire d’Israël face à l’Egypte, la Syrie, la Jordanie, l’Irak et le Liban, permet aux israéliens de conquérir la bande de Gaza, la Cisjordanie, le Golan, la péninsule du Sinaï et Jérusalem-Est,
- l’offensive de l’Egypte et de la Syrie, le 6 octobre 1973, au moment du Yom Kippour, débouche, à Camp David, sur un accord de normalisation des relations et le retrait d’Israël du Sinaï,
- en 1979, la signature du traité « israélo-égyptien » aboutit à la partition de la bande de Gaza (trois zones administrées par l’Egypte et une autre par Israël),
- en 1981, l’égyptien Anouar el-Sadate, promoteur de cet accord de paix avec Israël, est assassiné par des islamistes de l’armée égyptienne,
- la première « intifida » (guerre des pierres) de 1987, soulèvement du peuple palestinien et au cours duquel naît le Hamas, jugeant l’OLP, trop conciliante vis-à-vis d’Israël,
- le 15 novembre 1988, date à laquelle Yasser ARAFAT se prononce favorable à la création d’un Etat palestinien, sur la base des résolutions 181, 242 et 388 de l’ONU, reconnaissant alors l’Etat d’Israël dans ses frontières d’avant 1967,
- les Accords d’Olso de 1993, ayant donné naissance, sous le parrainage des Etats-Unis, à une Autorité Palestinienne, appelée à diriger, de façon autonome, la bande de Gaza et une partie de la Cisjordanie,
- l’assassinat, le 4 novembre 1995, du Premier ministre israélien, Yitzhak RABIN,
- les années 2000 ponctuées, notamment, par divers événements : les sommets de Camp David centrés sur la question des réfugiés palestiniens, la seconde « intifada », l’échec du plan de paix, signé par Yossi BEILIN, Ministre israélien et Yasser ABD RABB, Ministre palestinien ainsi que par le retrait d’Israël, fin 2005, de la bande de Gaza, après 38 ans d’occupation,
- le 30 avril 2003, un quatuor diplomatique (ONU, Union européenne, Etats-Unis et Russie) adopte « une feuille de route », destinée à faire aboutir par étapes la création de deux Etats (10),
- en 2006, le Hamas sort vainqueur électoralement, en remportant la majorité des sièges au Conseil législatif palestinien (CLP) et alors qu’en juin 2007, celui-ci prend le contrôle militaire et politique de la bande de Gaza et l’Autorité Palestinienne, celui de la Cisjordanie, située sur la rive occidentale du fleuve Jourdain,
- le Fatah, fraction politique palestinienne et le Hamas s’affrontent en Cisjordanie et ne parviennent pas à maintenir un gouvernement d’unité,
- en 2008, l’Egypte ferme sa frontière avec la bande de Gaza et Israël lance l’opération « Plomb durci », bombardements visant les installations du Hamas,
- face aux tirs de roquettes du Hamas, Israël décide, dans les années qui suivent (opération « Pilier de défense » en 2012 et « Bordure protectrice » en 2014) de renforcer l’endiguement de la bande de Gaza par le biais du dispositif « dôme de fer »,
- en décembre 2018, la Cour constitutionnelle palestinienne valide la dissolution du CLP et alors que des tentatives, sans succès, de rapprochement s’opèrent entre le Fatah et le Hamas,
- la même année, les gazaouis protestent contre les bombardements des israéliens, mouvement issu de la société civile, néanmoins « récupéré » par le Hamas,
- depuis 2020, les accords d’Abraham permettant de renouer des liens diplomatiques entre Israël et certains pays arabes.
A cela s’ajoutent les situations de tensions permanentes :
- que ce soit en Cisjordanie, où 593 « chekpoints » israéliens assurent une surveillance de la circulation des Palestiniens,
- par le fait que 85 % des ressources en eau palestiniennes soient contrôlés par Israël,
- ou encore, au travers des 750 000 colons installés en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, vivant aux côtés de 2 800 000 palestiniens (en sachant que sur les 219 implantations dénombrées, considérées comme « illégales » par l’ONU ,147 d’entre elles ont été organisées sans autorisation officielle d’Israël…) (11).
Autant de faits, d’incompréhensions et d’occasions perdues au fil d’un temps long, qui interrogent à nouveau sur la nature profonde de ce conflit et sur la manière d’envisager l’avenir pour cette région, au cœur des contradictions du monde…
Il convient tout d’abord d’énoncer que la relation entre Israël et le monde « arabo-musulman » intègre nécessairement une dimension religieuse, notamment parce qu’il s’agit bien d’une implantation sur la « terre sainte ». La présence des lieux saints à Jérusalem accroit cette tension permanente.
Si l’esplanade des Mosquées et le Mont du Temple représentent, pour les musulmans, le troisième lieu saint de l’Islam (où se dresse la Mosquée Al-Aqsa et surtout l’emplacement où Mahomet se serait élevé au ciel), il est, pour les juifs, le lieu où étaient situés le Temple de Salomon et le Temple d’Hérodote (dont le seul vestige est le mur des lamentations, au cœur de la vieille ville). Au travers de ces symboles, minorer le fait religieux pour la compréhension de ce conflit serait absurde.
Plus encore, du fait des changements dans la représentation de la nébuleuse palestinienne, nous serions passés d’un combat « nationaliste » à une « guerre de civilisations ». Si pour la communauté internationale, le mouvement palestinien était représenté, jusqu’au début des années 1980, par l’OLP et son visage, Yasser ARAFAT, celui-ci a bien été remplacé par le Hamas, produit de l’activation de groupuscules islamistes.
Ainsi, les positions s’exacerbent aujourd’hui, autour des revendications du Hamas, utilisant l’Islam, porteur d’un projet politique, pour se démarquer de l’Autorité Palestinienne « laïque » et alors que s’affirment, par ailleurs, des juifs ultraorthodoxes, partisans d’une approche plus identitaire et religieuse, différente du sionisme des origines.
Pour autant, le conflit « israélo-palestinien » ou plus globalement, « israélo-arabe » est bien né du fait de la création de l’Etat Hébreu, « revendiquant sa souveraineté » (12) sur la même terre que celle du peuple palestinien… L’histoire du conflit montre alors que l’enjeu de la conquête des territoires est central, générant, des camps de réfugiés, des occupations et des retraits, selon les circonstances et les rapports de force. La finalité des tentatives d’accords, ayant ponctué la vie diplomatique dans cette région, est bien d’aboutir à une répartition du contrôle des terres entre les parties.
Nadine PICAUDOU, qui s’est penchée sur ce siècle d’histoire des Palestiniens, atteste de cette réalité. « De l’inquiétude des paysans arabes face à l’installation des immigrants juifs à la fin du XIXe siècle jusqu’à la naissance d’une autonomie palestinienne au sein des enclaves de Cisjordanie et de Gaza », c’est bien, selon cet auteur, l’affirmation, au sein de la communauté palestinienne, d’une conscience nationale tournée vers la quête d’un Etat.
Il nous faut donc revenir, dans ce contexte, à une évidence, à savoir, que la résolution du conflit passera par l’application de solutions territoriales admises par tous, permettant, à ces deux peuples, de pourvoir vivre en sécurité.
L’équation à résoudre est que chacun d’eux estime « être chez lui au même endroit » (13). Ce qui rend d’ailleurs la tâche encore plus difficile est que le territoire en question comprend une surface limitée et tout est « imbriqué », comme le souligne Marie DURRIEU. A Jérusalem, « d’une rue à l’autre, on passe du souk arabe au quartier juif ».
Hébron, ville Palestinienne de Cisjordanie, est dans la même situation. Certaines colonies israéliennes sont présentes au sein même de la cité et à noter que le tombeau des patriarches est divisé en deux, « d’un côté une mosquée et de l’autre une synagogue ».
Autre difficulté, complexifiant les conditions d’un dialogue… : l’asymétrie constatée du conflit qui met « face à face » un Etat et des organisations terroristes, qualifiées comme telles, par Israël, les Etats-Unis, l’Union européenne et de nombreux autres pays.
… au traumatisme du 7 octobre
Si la tragédie du 7 octobre marque une nouvelle étape meurtrière dans ce conflit, elle illustre parfaitement cette asymétrie…
L’histoire a d’ores et déjà retenu cette date, en dépit de la volonté, ici ou là, de la faire disparaître de nos mémoires… [7]
Les images du drame et les témoignages des survivants sont glaçants, provoquant, en ce jour d’octobre, une véritable sidération dans les opinions publiques et surtout, en surprenant les services de renseignements dans leur ensemble, israéliens d’abord et pays arabes compris (14).
Selon les dires d’une source du Hamas, tels que rapportés à l’Agence Reuters (15), l’opération, préparée de très longue date, s’est organisée en quatre parties : 3 000 roquettes tirées depuis Gaza et alors que des combattants franchissaient la frontière en ULM ; assaut du mur fortifié, par l’utilisation d’explosifs et de bulldozers, laissant ainsi des 4X4 s’infiltrer et des soldats se livrer à des atrocités ; attaque, dans le même temps, du quartier général de Tsahal dans le sud de Gaza (16), permettant de couper la communication ; et enfin, la capture de 250 otages, transférés à Gaza (17). Au total, une action « terroriste » qui s’est déployée sur 30 kilomètres carrés, ayant provoqué l’exécution de 1 140 personnes, civils pour la plupart (18).
Nous savons aujourd’hui que le planificateur de cette opération est le chef du Hamas à Gaza, Yaya SINWAR, ayant passé 20 ans dans les prisons israéliennes, soutenu par le chef militaire, Mohammed DEIF, leader des brigades Ezzedine Al-Qassam.
Erwan DAVOUX précise d’ailleurs que ce n’est pas tant l’attaque qui est « surprenante mais sa puissance, sa coordination, son exécution maitrisée et sa cruauté » (19).
Cette tragédie a eu aussi pour conséquence immédiate, la réinscription du conflit israélo-palestinien sur l’agenda international et celui de l’ONU, « brisant, violemment, l’invisibilisation dans laquelle celui-ci semblait plongé » (20). Marie DURRIEU évoque même une « sorte de déni très étonnant » de la population israélienne, jeunes en particulier (21), plus préoccupée, ces dernières années, par la menace iranienne.
Le monde arabe se préoccupe à nouveau de la question, alors que les « accords d’Abraham » de 2020 avaient en effet facilité le rapprochement de certains pays du Golfe et d’Afrique du Nord avec Israël. Qui plus est, un conflit qui s’exporte sur la planète entière, divisant, notamment, sur fond d’antisémitisme de plus en plus assumé, les opinions publiques des pays occidentaux, entre ceux qui reconnaissent d’abord, le « droit d’Israël à se défendre » et d’autres, polarisés par la cause palestinienne.
Ce que cette tragédie a révélé
Sur un autre plan, cet événement douloureux a mis en évidence certaines failles de l’armée israélienne et alors que les responsables du Hamas ont pu avoir accès à une quantité d’informations (22), comprenant, pêle-mêle, les plans des bases militaires, des détails sur l’organisation des kibboutz, situés à proximité et même sur les effectifs des postes de police de l’Etat hébreu….
Il convient d’admettre, au travers de cette préparation très fine, que le Hamas (23) aura réussi à déjouer le système de défense israélien, pourtant considéré comme un des meilleurs du monde et à contourner la barrière d’une frontière, qui était, en théorie, impossible de violer…
Les massacres de 2023 représentent l’acte de guerre le plus meurtrier mené sur le sol israélien depuis 1949 : une agression cependant bien différente des précédentes, notamment celles menées au moment de la fondation de l’Etat hébreu.
L’attaque est venue non pas d’une coalition d’Etats mais d’organisations militaires multiples - toujours plus difficiles à combattre -, comme les Brigades al Qassam (branche militaire du Hamas), alliées au Jihad islamique palestinien et aux Brigades des martyrs d’al-Aqsa, proche du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP).
Il est à noter que le 7 octobre, ayant ouvert un front au sud d’Israël, comporte aussi des similitudes avec la guerre du Kippour, par son « effet de surprise » et du fait d’une mauvaise appréciation des « capacités et des intentions de l’adversaire » (24).
A cet égard, Yvonnick DENOEL en arrive même à la conclusion que cet événement de 2023 consacre, d’une certaine façon, l’échec des services de renseignements, notamment du Shin Bet (renseignement intérieur) et d’Aman (services de l’Etat-major) (25), qui n’ont pas été en mesure, en dépit des moyens développés, de prévenir l’offensive.
Et pourtant, le « contrôle » de Gaza et de ses activités, par les services israéliens, a toujours été constant…
Le New York Times a révélé, le 30 novembre 2023 (26), que l’armée israélienne était en possession, au cours de l’année 2022, d’un plan de bataille du Hamas, ressemblant, assez fortement, à celui exécuté le 7 octobre… A cette alerte, s’ajoute celle de juillet 2023, au moment où l’unité 8 200, chargée de la surveillance électronique, indiquait que le Hamas se livrait à des exercices militaires, qui font penser au mode d’action du 7 octobre.
Dès les années 2010, le Mossad, au travers de sa cellule « task force Harpoon » (27), avait en tout état de cause mis en évidence les importantes ressources financières accumulées par le Hamas destinées à couvrir les dépenses de son action guerrière et dont l’essentiel provenaient du Qatar, de l’Iran et d’importants trafics de drogue… Autant de financements, articulés avec le pilotage, par le Hamas, de sociétés - qui n’ont jamais fait l’objet de sanctions économiques - opérant dans diverses activités (minières, routes, immobilier…) et dont les bénéfices ont été stockés dans une banque turque. Entre 2020 et 2023, le Hamas aurait ainsi accumulé plus d’un milliard de dollars, ayant directement aidé à la préparation du 7 octobre, au travers, notamment de l’achat d’armes et qui pourrait s’avérer très utile dans la phase de reconstruction d’après-guerre…
Des ex-responsables du Mossad préfèrent, quant à eux, voir dans le « désastre » (28) du 7 octobre, le résultat des défaillances d’un système de renseignement privilégiant, depuis plusieurs décennies, la technologie « au détriment de l’humain ». Il apparaît, à l’évidence, délicat de faire reposer la surveillance des frontières par la seule installation de caméras et de « mitrailleuses actionnées à distance » et que rien ne peut totalement remplacer la présence d’hommes en armes… Il en est de même des limites de la technique des « capteurs hyperspectraux » pour détecter, dans les profondeurs, les mouvements de personnes ou le transport d’armes et d’explosifs, au sein du vaste réseau de tunnels de Gaza, véritable atout défensif du Hamas.
Ces premiers souterrains, conçus en 2006, sous la frontière de Gaza avec l’Egypte, dans le but de détourner le blocus « israélo-égyptien », sont devenus, en quelques années, d’immenses labyrinthes traversant l’ensemble du territoire palestinien « sur des centaines de kilomètres et reliant celui-ci à d’autres camps de réfugiés de la bande ». Nous savons d’ailleurs que ces tunnels, construits, pour certains, avec l’aide du Hezbollah, ont remis au goût du jour ce que le Viêt-Cong avait utilisé contre l’armée américaine. C’est la raison pour laquelle les services de renseignements israéliens, en alerte face à ce danger, ont tenté, à plusieurs reprises et sans véritable succès, d’en déjouer la construction, en s’appuyant sur des outils sophistiqués d’écoute.
Au-delà de ces choix stratégiques en matière de sécurité, vitaux pour Israël, les autorités israéliennes concentrent, aujourd’hui, tous leurs efforts techniques, avec le soutien des Etats-Unis, sur le repérage physique des responsables du Hamas et, face à la pression des familles concernées, sur la localisation des otages, séquestrés dans différents tunnels (29). Comment enfin de ne pas suspecter, derrière l’opération meurtrière du 7 octobre, au regard de la complexité de son organisation, la « main » de l’Iran, de la Légion des gardiens de la Révolution, de son armée, de ses services de renseignements et de la structure alliée, du Hezbollah, au Liban … ?
Le Hamas n’était pas partie prenante historiquement, du fait de son soutien aux rebelles sunnites au moment de la guerre civile de 2011 en Syrie, de la grande coalition « pro-iranienne » chiite, associant, en effet, le Hezbollah, les Houtis du Yemen et différents groupes disséminés. A ce sujet, c’est donc bien le leader de la branche militaire du Hamas, Yahya SINOUAR, qui aura scellé la matérialisation d’un accord durable avec le pouvoir chiite iranien.
Dans le cadre de cette entente, l’Iran a ainsi fourni au Hamas, depuis 2014, des missiles et le Hezbollah a aidé à leur fabrication, en utilisant le transit du matériel par la voie maritime ou via l’Egypte. Si l’implication directe de l’Iran dans la préparation du 7 octobre n’est pas prouvée, l’appui des dirigeants de la République islamique a donc permis au Hamas d’harceler son « ennemi » et alors que depuis 2005 - date du retrait de la bande de Gaza - Israël a été la cible de milliers de roquettes.
Selon Erwan DAVOUX, le pouvoir israélien n’aurait donc pas vu « le Hamas changer, peu à peu, de nature et de dimension », fruit de la diversification des forces politiques palestiniennes. Le mouvement du Hamas occupe en quelque sorte l’espace de l’autorité palestinienne historique et saura se reconstituer, à l’issue du conflit…
La guerre menée contre le Hamas ne peut pas être non plus sans conséquence politique pour l’Etat hébreu lui-même et ses relations à venir avec les pays arabes, du fait du « prix à payer », après les images des bombardements meurtriers sur Gaza et face à l’accroissement des victimes civiles « collatérales ». En notant, que l’événement du 7 octobre a aussi, entraîné, depuis près d’un an, un autre front au nord, provoqué par le Hezbollah, solidaire des sunnites du Hamas et soutenu par l’Iran et que de son côté, l’armée israélienne a aussi mené des opérations de « contre-terrorisme », au nord de la Cisjordanie, dans des zones autonomes palestiniennes.
Au-delà de la « guerre de civilisations » que représente, de façon larvée ou revendiquée, le massacre du 7 octobre, celui-ci engendre aussi un « choc » géopolitique… Les repositionnements stratégiques des grandes puissances et des principaux acteurs régionaux sont en cours, dessinant, en quelque sorte, les contours d’un « avenir » très incertain pour le Proche-Orient. En effet, ce nouveau conflit, impliquant les Etats-Unis comme jamais dans cette région du monde, a tendance à reléguer les autres foyers de guerre au second plan, notamment le conflit « russo-ukrainien ».
Un conflit aux multiples retombées géopolitiques
Un an après les massacres du 7 octobre et leur cortège d’horreur et de drames humains, le conflit israélo-palestinien a fait resurgir la question de la reconnaissance d’un Etat Palestinien, désormais érigée en cause universelle et récurrente dans le débat international, alors même que ce combat avait été délaissé aussi bien par les acteurs régionaux qu’internationaux depuis la fin du processus des accords d’Oslo.
C’est peu de dire que le traumatisme du 7 octobre en Israël et ses multiples conséquences militaires à Gaza en Cisjordanie et désormais au Sud Liban, a provoqué une onde de choc à la fois au sein de la communauté internationale et dans les opinions publiques.
La question du Proche-Orient s’est également invitée dans les débats électoraux aux Etats-Unis et en Europe comme ce fut le cas lors des échéances électorales de juin et juillet en France, sur les campus européens et américains, jusque dans les récents actes terroristes en Allemagne à Solingen ou en France devant la synagogue Beth YAAKOV de la Grande Motte, revendiqués comme un soutien à la cause palestinienne.
Ainsi, au terme d’un conflit de près d’un an et nonobstant les pourparlers engagés depuis plusieurs mois pour aboutir à un cessez-le feu et à la libération des otages israéliens, la guerre ne cesse de produire ses effets dévastateurs et paraît à bien des égards, hors de contrôle, laissant planer le risque de retombées à effets multiples sur les opinions publiques internationales.
En effet, à l’horreur de la « razzia » pogromiste du 7 octobre répond l’hécatombe à Gaza et son cortège de drames humanitaires.
Dans son rapport du 16 août 2024, l’UNICEF avance le chiffre de 39 665 morts dont plus de 14 100 enfants et estime le nombre de blessés à 92000, selon les sources du ministère de la Santé du Hamas (30). Par ailleurs, une étude de la revue médicale britannique the Lancet publiée le 5 juillet 2024, reposant sur l’analyse de chercheurs, rapporte que le conflit pourrait être à l’origine du décès de 7 à 9% des habitants de la bande de Gaza (31). En outre, il est admis que près de 90 % de la population de la bande de Gaza a été déplacée.
Si le centre de gravité du conflit invite à appréhender principalement la situation à Gaza, la réalité impose la prise en compte d’autres aires de combat, dans un contexte où Israël a déclaré dès le 8 octobre 2023, l’état de guerre, ce qui ne s’était jamais produit depuis la guerre de Kippour en 1973. Sur un plan purement militaire, le conflit est multidimensionnel, Israël combattant sur trois fronts : celui de Gaza, de la Cisjordanie, et du sud Liban.
Les récents évènements liés aux explosions de bipeurs au Liban frappant massivement le Hezbollah et l’élimination de son chef Nasrallah marquent incontestablement un recentrage des opérations militaires au Sud Liban et potentiellement, en Iran, après le déluge de missiles balistiques tirés par l’Iran sur le territoire Israélien. Sans prétendre à l’exhaustivité dans un contexte mouvant et incertain, un bref bilan de l’action militaire d’Israël depuis le 7 octobre s’impose.
S’agissant du conflit à Gaza, si l’Etat Hébreu ne peut revendiquer « l’éradication » totale du Hamas (impossible dans les faits),il a toutefois réussi à démanteler les infrastructures terroristes dans la bande de Gaza, en décapitant sa structure dirigeante avec notamment l’assassinat de son chef politique Ismaïl Haniyeh et a très fortement affaibli sa capacité d’organisation et d’action. Cette situation permet aujourd’hui à Israël – sans néanmoins délaisser le secteur de la bande de Gaza- d’envisager de redéployer son action sur d’autres théâtres d’opération, en Cisjordanie et surtout, au sud Liban.
A propos du second objectif de l’action militaire à Gaza, à savoir la libération des otages du 7 octobre, le bilan est très faible puisque seuls, cinq otages ont été libérés par les forces militaires Israéliennes, les 110 autres ayant fait l’objet d’une libération dans le cadre de l’unique accord d’échange d’otages au cours d’une trêve d’une semaine en novembre 2023.
En Cisjordanie, le conflit engagé au lendemain du 7 octobre se traduit par des actions militaires massives (32) et renforce l’Etat Hébreu dans sa volonté de poursuivre sa politique d’établissement de colonies engagée depuis 1967, qui représente aujourd’hui, comme mentionné plus haut, un peuplement de plus de 700 000 colons Israéliens contre 200 000 en 1995. Au-delà de la politique de peuplement poursuivie par Israël, Tsaal intervient dans les camps de réfugiés Palestiniens – à Jénine en particulier dans le nord de la Cisjordanie – afin de détruire les groupes Palestiniens jugés dangereux.
Concernant le Sud Liban, il est devenu, après les actions conduites à Gaza et en Cisjordanie, le nouvel objectif militaire d’Israël qui entend d’une part protéger les populations afin de permettre le retour en toute sécurité des 60.000 habitants ayant quitté le territoire du nord du pays depuis le début du conflit , et d’autre part, lutter contre le Hezbollah, allié de l’Iran et engagé depuis le conflit israélo-palestinien au côté du Hamas en procédant régulièrement à des tirs de roquettes et de missiles depuis la frontière du sud Liban.
Malgré les tensions persistantes depuis octobre 2023 de chaque côté de la frontière entre Israël et le Liban, jusqu’à présent, les deux parties s’étaient efforcées de contenir les hostilités afin d’éviter de basculer dans un conflit généralisé. Cherchant à établir une forme d’équilibre de la terreur, le Hezbollah et l’Iran ont procédé à plusieurs attaques aériennes interceptées par le système de défense aérienne Israélien via le dôme de fer et le soutien de pays tiers, qui nourrissent une tension permanente et des risques réels d’embrasement de cette région.
Or, cette forme de modus vivendi semble aujourd’hui dépassée comme en attestent les récentes déclarations du ministre de la défense Yoav Gallant qui indiquait qu’Israël entamait « une nouvelle phase de la guerre ", précisant que « le centre de gravité se déplaçait vers le nord grâce à la réorientation des ressources et des forces ».
C’est dans cette perspective de recentrage stratégique qu’il faut replacer les opérations menées – non revendiquées par Israël - contre le Hezbollah au sud Liban les 17 et 18 septembre derniers, au travers des explosions coordonnées de bipeurs puis de talkies-walkies appartenant à des membres du Hezbollah, faisant plusieurs dizaines de morts et des milliers de blessés et plus encore l’élimination physique d’Hassan Nasrallah dont le retentissement est immense et bouleverse la donne.
Israël considère que c’est bien désormais du sud Liban que proviennent les attaques aériennes de missiles et de drones sur le Nord du territoire Israélien, et que se situe désormais le principal danger. Or, après avoir régulièrement promis la disparition du Hezbollah depuis 2006, Israël ne peut que constater la présence toujours active du mouvement alimenté et soutenu par l’Iran, qui constitue une vraie menace pour l’Etat Hébreu.
Or, après avoir régulièrement promis la disparition du Hezbollah depuis 2006, Israël ne peut que constater la présence toujours active du mouvement alimenté et soutenu par l’Iran, qui constitue une vraie menace pour l’Etat Hébreu.
S’il est indéniable que les opérations d’explosion d’appareils de communication et que la mort de Nasrallah a frappé le Hezbollah au cœur de ses bastions et de son organisation, emportant ainsi d’importantes conséquences sur son fonctionnement, son système de communication et sa stratégie militaire, il demeure le maillon essentiel de la stratégie de combat instituée par l’Iran contre Israël et les Etats-Unis.
La question est désormais de savoir dans un contexte d’affaiblissement très sévère de son allié au Liban, comment l’Iran, sidéré et apparemment en panne de solution, entend réagir face à cette offensive d’Israël au sud Liban. Si les autorités iraniennes promettent un châtiment exemplaire, jusqu’où l’Iran peut -il aller ?
Les frappes balistiques massives du 1er octobre ont montré la puissance de feu du régime des mollahs mais aussi la capacité de résistance d’Israël, via le « dôme de fer » et le soutien militaire indéfectible des Etats-Unis et de certains pays européens (France et Royaume Uni notamment) qui ont rappelé que de la défense de la sécurité d’Israël est un principe absolu.
Côté israélien, dès le 23 septembre 2024, le Premier ministre Netanyahou, indiquait que « la politique d’Israël n’est pas d’attendre les menaces mais de les anticiper, ce que nous faisons » et le lendemain des attaques aériennes du 1er octobre déclarait précisément : « L’Iran a commis une erreur et en paiera le prix ».
De fait, dès ce 23 septembre, Israël est passé à l’action en procédant à des frappes aériennes en bombardant près de trois cents sites du Hezbollah sur le sud du Liban dans le secteur de Zahrani et de la plaine de la Bekaa.
L’intensification des hostilités entre l’armée israélienne et le Hezbollah tant redoutée par la communauté internationale et les Etats voisins du Proche et Moyen-Orient - au premier rang desquels le Liban, une nouvelle fois victime de ce conflit - constitue ce que beaucoup d’observateurs considèrent comme l’ultime étape conduisant à l’embrasement généralisé.
Par une accélération des évènements, la tentation d’envahir le sud Liban, régulièrement évoquée en Israël depuis plusieurs semaines, qui divisait au sein même du gouvernement et de l’opinion, a pris forme à travers les premières opérations des forces armées israéliennes au sol.
Dans ce contexte, sur le front diplomatique, Washington s’est directement adressé à l’Iran, pour lui demander d’éviter l’engrenage, pendant que l’ONU a appelé à la retenue maximale des parties et que la FINUL juge toute escalade supplémentaire dangereuse et porteuse de conséquences profondes et dévastatrices pour les personnes vivant de part et d’autre de la ligne bleue (33) , mais aussi pour l’ensemble de la région.
Ce nouvel environnement politico-militaire au Liban, aussi dramatique soit-il, n’en constitue pas moins une opportunité pour les forces libanaises disparates, opposées au Hezbollah, de voir son influence décliner et avec elle celle de l’Iran.
A ce titre, les récentes déclarations du Premier ministre Libanais Najib Mikati, qui s’est dit prêt à appliquer pleinement la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations Unis prévoyant le retrait du Hezbollah de la région libanaise située au sud de fleuve Litani, à environ 30 kilomètres de la frontière avec Israël, constituent un signe d’évolution politique au Liban et l’expression d’une volonté de sortir le pays de l’étau dans lequel il est placé depuis plusieurs décennies.
Outre ces trois fronts, mentionnons les attaques et tentatives de déstabilisation menées en mer rouge et jusque sur le sol israélien par les Houthis, groupe politique et religieux armé appartenant à la minorité musulmane chiite du Yémen, les Zaidis, soutenues par l’Iran et aux côtés du Hamas. En tout état de cause, les actions militaires ne sauraient être le seul critère d’appréciation du rapport de force entre les belligérants.
En effet, l’ampleur du nombre de morts, la crise humanitaire à Gaza et le recours à des procédés condamnés par la Cour internationale de justice, place l’Etat Hébreu dans une situation de condamnation très large par la communauté internationale.
Dans les conflits contemporains, la guerre de l’information a pris une importance considérable et à l’heure de la généralisation des smartphones dotés de caméras, dont les images se retrouvent sur les réseaux sociaux, les conflits ne se déroulent plus à huis clos.
Autrement dit, pour Israël, le combat militaire ne saurait constituer le seul objectif, car se joue également sur ce théâtre de guerre, le combat informationnel et celui de l’image. Or, sur ce point, Israël se retrouve du statut d’agressé et de victime à celui d’accusé.
Cet implacable retournement des opinions publiques est largement alimenté par les images des destructions à Gaza diffusées dans les médias internationaux.
L’horreur du 7 octobre et l’intensité des représailles, autant que l’enlisement du conflit et l’absence de voie de sortie, ont, en tout état de cause, durablement instauré des lignes de fractures que d’aucuns jugent difficilement surmontables au sein des opinions Israélienne et Palestinienne. Génération après génération se perpétue le sentiment que le conflit Israélo-palestinien échappe à tout mécanisme de régulation, nourrissant dès lors une forme de spirale infernale et conduisant à une forme d’indifférence absolue, de négation de l’autre partie.
Entre la politique du pire incarnée par le Premier ministre israélien Netanyahou et la prise en otage de la population de Gaza par le Hamas, les deux parties, comme le souligne Gilles Kepel, se condamnent à l’impuissance (34). Cette fracture profonde au sein des deux sociétés renforce la défiance envers tout processus de paix auquel Israéliens et Palestiniens semblent aujourd’hui ne plus croire.
Loin du dicton « les vieux mourront et les jeunes oublieront », tout se passe comme si les générations à venir étaient condamnées à perpétuer ce processus de haine et de discorde sous la forme d’une guerre éternelle.
Autorité Palestinienne : dans l’impasse ?
Au sein de l’opinion Palestinienne, la voie politique semble ne présenter aujourd’hui aucun débouché sérieux de sortie de crise, tant les acteurs en présence, entre terreur et impuissance, ont bien du mal à imaginer des solutions fiables et durables.
En réalité, seule une lecture des rapports de force intra-palestiniens permet de mesurer l’impasse politique et sociétale qui frappe le peuple Palestinien.
S’agissant de l’Autorité Palestinienne, incarnée par le Fatah -et son Président Mahmoud HABBAS- elle est totalement discréditée, notamment auprès de la jeunesse et dans les faits, se montre incapable, depuis 2021 et le report des élections générales, d’assurer une légitimité du pouvoir.
Observons que depuis le début du conflit, l’Autorité Palestinienne, censée incarner la représentation du peuple Palestinien, n’a pas été en mesure d’enclencher la moindre initiative significative tant sur le plan intérieur que diplomatique comme le révèle l’attitude du Président HABBAS qui ne s’est toujours pas rendu dans la bande de Gaza.
Seul acte politique à son actif depuis un an (sous la pression insistante de Washington), la nomination le 14 mars 2024, d’un nouveau premier ministre Mohammad Mustafa, chargé de constituer un gouvernement ayant pour objectif de favoriser le retour de l’Autorité dans la bande de Gaza, « dont le Hamas l’a chassée en 2007 et où le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, refuse de lui laisser la moindre responsabilité » (35).
Cette initiative, jugée contraire à » la volonté du peuple palestinien », a immédiatement été condamnée dans un communiqué publié le 15 mars par le Hamas et ses alliés, le Jihad islamique, les marxistes du Front populaire de libération de la Palestine et l’opposant démocrate Mustafa Barghouti, considéré comme le « Nelson Mandela palestinien » et rare personnalité à susciter l’approbation au sein d’une population lassée par des décennies de vacuité au sein des organisations représentatives Palestiniennes.
A l’incurie de l’Autorité Palestinienne répond la terreur et la radicalité du Hamas. Le Hamas dont l’appellation complète est Mouvement de la résistance islamique, est issu des Frères musulmans et a été créé, comme déjà mentionné, lors de la première Intifada de 1987. Mouvement islamiste et nationaliste, le Hamas, depuis sa création, n’a cessé de revendiquer la lutte armée et de rejeter les processus de paix, comme les accords d’Oslo de 1993, refusant la reconnaissance de l’Etat d’Israël dont il prône la destruction. Sa finalité est de récupérer les territoires palestiniens occupés militairement et d’édifier un Etat palestinien théocratique.
Son organisation repose en partie sur une branche politique et une branche militaire composée des brigades Ezzedine Al-Qassam, qui multiplient attentats et attaques auxquelles Israël réplique toujours, exposant ainsi la population civile palestinienne placée en situation de bouclier humain.
En organisant l’attaque terroriste d’ampleur et les massacres du 7 octobre, le Hamas est revenu au premier plan de la scène médiatique et politique alors même, comme précisé plus haut, qu’il est au pouvoir dans la bande de Gaza, qu’il administre seul, depuis les élections législatives de 2007, après en avoir évincé par la force, le Fatah. Radicalisé et marginalisé par la communauté internationale, le Hamas s’appuie sur une partie de la population palestinienne et particulièrement sur la frange jeune, qui rejette le Fatah, accusé d’avoir trahi la cause palestinienne en acceptant de considérer l’Etat Hébreu comme un interlocuteur.
Dans un territoire très fortement peuplé d’une jeune génération -71% de la population avait moins de 30 ans en 2021, dont 41 % entre à 14 ans- le Hamas sait pouvoir s’appuyer sur le double effet du temps et de la démographie pour revendiquer une lutte radicale contre » l ’ennemi israélien » et ainsi justifier les actions terroristes paroxystiques comme celle du 7 octobre. Dans ce contexte il est permis de douter de la volonté du chef du Hamas Yahya Sinouar et de ses affidés, de sortir de cette logique mortifère et destructrice, nonobstant les déclarations récentes d’Hossam Badran, membre du bureau politique du Hamas, qui, en juillet dernier, a proposé qu’un gouvernement indépendant formé de personnalités apolitiques dirige la bande de Gaza et la Cisjordanie une fois que les hostilités auront cessé, et organise des élections générales.
Toute projection sur le niveau de confiance et de soutien dont bénéficie le Hamas au sein de la population paraît hasardeuse au regard du peu de fiabilité des sondages et enquêtes d’opinion, mais tout laisse à penser que la stratégie du Hamas consistant à provoquer la foudre militaire d’Israël pour exploiter politiquement le chaos qui s’ensuit, fonctionne auprès d’une partie non négligeable de la population et principalement auprès de la jeunesse.
Une opinion publique israélienne fissurée mais unie face aux multiples périls
Depuis le lancement par Israël de l’opération « Glaive de fer », le 9 octobre 2023, avec le rappel de 300.000 réservistes, et la double promesse des autorités israéliennes visant à la libération des otages et l’élimination du Hamas, on assiste, face à l’enlisement du conflit et à la non-résolution de la question des otages, à une fracturation de l’opinion israélienne.
La société civile est traversée par un traumatisme existentiel lié à la perte du sentiment d’invincibilité, à la suite du massacre du 7 octobre et à l’immixtion de terroristes du Hamas sur le sol israélien. La peur de la société israélienne qui libère le ressentiment et la haine face à la cause palestinienne, ne semble plus contenue par les institutions politiques, elles-mêmes en incapacité de toute régénération politique.
Le départ, depuis près d’un an, de nombreux israéliens (près de 80.000) vers l’étranger, est un signe de ce délitement de la société civile qui ne perçoit pas de solution de stabilité et de sécurité durable. Derrière la contestation de la personne du premier ministre Netanyahou qui se maintient au pouvoir durant le temps du conflit afin de repousser l’échéance judiciaire qui le menace, et la controverse sur la libération des otages, apparaît un vide politique inquiétant et le sentiment d’une absence d’alternative à la politique actuelle. Dans ce contexte de dévalorisation de la politique et des institutions, l’armée apparaît aujourd’hui comme un pôle de stabilité, garante des valeurs fondatrices d’Israël.
Le « hard power » n’hésite plus à travers notamment son chef d’état-major, à dénoncer la politique conduite par le gouvernement israélien en l’absence d’objectif politique clairement établi. L’ancien responsable de l’état-major israélien a de son côté appelé à des élections anticipées face à un pouvoir de plus en plus contesté dans la rue et délégitimé.
Pour autant, ces mouvements au sein de l’opinion publique israélienne, traversée comme toute démocratie, par des débats et des controverses, doivent être relativisés, en raison des menaces persistantes sur la sécurité et l’existence même de l’Etat Hébreu.
Les attaques aériennes du 1er octobre, sous la forme de 200 missiles balistiques tirés depuis l’Iran pour atteindre Israël en moins de vingt minutes, placent de fait la population israélienne dans une posture de résistance et d’union nationale pour faire face aux différents ennemis extérieurs. Dans ce contexte de tension extrême, la société israélienne transcende ses clivages pour assurer sa sécurité et sa survie.
Attentisme des Etats voisins du Moyen-Orient
Au lendemain du 7 octobre et des premières actions militaires d’Israël dans la bande de Gaza sous forme d’actions armées ciblées et de représailles, nombre d’observateurs, sans annoncer un embrasement régional, pronostiquaient une réponse politique et diplomatique des puissances régionales en soutien aux Palestiniens.
Il était fréquemment rappelé qu’à travers les massacres du 7 octobre, le Hamas entendait perturber les pourparlers de normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite – dans le prolongement des accords d’Abraham qui ont, en effet « normalisé » les relations entre Israël, les Émirats arabes unis, le Bahreïn, le Maroc et le Soudan - et souhaitait ainsi rappeler aux États arabes que la question palestinienne n’est toujours pas réglée et qu’elle est consubstantielle au conflit avec l’Etat Hébreu. Selon le Hamas, ces accords ont contribué à consolider l’occupation israélienne des terres palestiniennes, tout en légitimant l’annexion par Israël de la Cisjordanie et l’isolement de Gaza.
Dès lors les responsables du Hamas considèrent que tout rapprochement entre Riyad et Tel-Aviv aurait pour conséquence de renforcer l’Etat d’Israël en évacuant symboliquement la dimension religieuse des tensions entre Israéliens et Palestiniens.
Or dans les faits, la réponse des Etats arabes est plutôt mesurée et équilibrée. Hormis le rappel d’ambassadeurs pour une durée limitée, aucun Etat Arabe n’a mis fin à sa représentation diplomatique en Israël, nonobstant les manifestations de solidarité avec les Palestiniens qui ont eu lieu dans nombre de pays arabes comme en Jordanie, où les manifestants à Amman, ont réclamé dès octobre 2023 , au lendemain des premières frappes israéliennes , la fin du traité de paix entre la Jordanie et Israël de 1994 , par lequel elle partage sa frontière avec Israël et la Cisjordanie - territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 - et la fermeture de l’ambassade israélienne.
De surcroît, le processus d’Abraham n’est pas remis en question et en fait, au-delà des émotions rhétoriques des diplomates et des dirigeants politiques arabes qui tentent de contenir leurs opinions publiques très largement solidaires de la lutte palestinienne, les principaux acteurs régionaux redoutent plus que tout un embrasement du conflit israélo-palestinien.
Se joue ainsi au Proche-Orient et plus encore au Moyen-Orient, une partition subtile qui vise à contenir ce clivage horizontal entre les opinions publiques arabes et les gouvernants qui constitue un danger intérieur pour ces Etats modérés qui ne souhaitent pas une instrumentalisation du facteur religieux qui pourrait les déstabiliser. C’est notamment le cas de l’Arabie saoudite qui cherche à tout prix à conserver son hégémonie dans la région et redoute plus que tout une victoire du Hamas et du Hezbollah et à travers ces mouvements, celle de son grand ennemi, l’Iran chiite.
L’Egypte et le Qatar : acteurs du dialogue
Ces deux Etats ont, pour des raisons différentes, intérêt à une désescalade du conflit « israélo-palestinien » et accueillent depuis plusieurs mois des négociations entre les belligérants.
Pour le Qatar qui détient en partie » les clés et la bourse », en sa qualité de principal bailleur de fonds du Hamas dans la bande de Gaza, il s’agit d’asseoir une image d’Etat incontournable dans la résolution du conflit et de puissance diplomatique. Dans la capitale qatarie, les négociations portent sur le cessez-le-feu et les modalités de libération des otages, en échange de celle de prisonniers palestiniens détenus par Israël, ainsi que sur la gouvernance future et l’administration de la bande de Gaza à l’issue de la guerre. De son côté, l’Egypte a participé au processus de blocus avec Israël pour empêcher la migration palestinienne au Sinaï Egyptien afin d’éviter une forme de » libanisation « du Sinaï par des réfugiés palestiniens qui constitueraient potentiellement un danger intérieur pour le régime du Président Abdel Fattah al-Sissi.
Le Caire redoute plus que tout une attaque terrestre israélienne de grande envergure dans la ville de Rafah où sont réfugiés plus d’un million de Palestiniens qui fuient les combats et pourraient, dès lors, être poussés à forcer la frontière égyptienne afin de se mettre à l’abri. Le régime Egyptien craint en effet que les Frères musulmans, très populaires dans le pays, profitent d’une invasion israélienne à Rafah pour tenter de déstabiliser le régime, en organisant des manifestations pro-Hamas, qui appartient à cette mouvance islamiste.
Au Caire, les discussions portent sur les moyens à mettre en œuvre pour accroître l’aide humanitaire à destination du territoire en état de siège mais également sur les conditions de réouverture et de contrôle du point de passage de Rafah, entre la bande de Gaza et l’Egypte. Pour l’heure, si les négociations engagées sont peu porteuses de fruits et peuvent être considérées comme un jeu de dupes, elles ont pour mérite de maintenir le contact entre les belligérants et de contenir le conflit.
Le rôle clé de l’Iran, désormais « en première ligne »
Principal soutien du Hamas sur le plan militaire et financier, l’Iran partage avec le mouvement terroriste palestinien la contestation de l’existence de l’Etat d’Israël. Depuis le 7 octobre l’Iran semblait malgré les attaques, offenses et actions israéliennes, se contenter de ripostes graduées et de représailles « mesurées », comme celles effectuées, le 13 avril 2024, à la suite de l’attaque du consulat iranien à Damas, sous la forme de 300 drones et missiles en direction d’Israël, ou au lendemain de l’assassinat du dirigeant du Hamas Ismail Haniyeh à Téhéran.
Cette prudence dans le conflit israélo-palestinien qui permettait à l’Iran de maintenir une forme d’équilibre de la terreur dissuasive, tout en cherchant à éviter un conflit ouvert avec Israël qui provoquerait le déclenchement du bouclier américain, est aujourd’hui bouleversée pour ne pas dire caduque, depuis les récents évènements au sud Liban évoqués précédemment. Pour le régime des mollahs, passé l’effet de sidération des opérations israéliennes qui ont décapité le Hezbollah, l’heure est à la réaction et l’offensive.
Les frappes balistiques massives sur Israël en sont une illustration mais témoignent aussi du renoncement contraint et forcé de Téhéran à agir par l’intermédiaire de son bras armé au Liban, le Hezbollah, aujourd’hui fragilisé, pour désormais intervenir en première ligne face à Israël. Or ce nouveau scénario bouleverse la stratégie de l’Iran qui jusqu’alors privilégiait le recours à des « proxys » utilisés comme bras armés du régime face à Israël. Cette nouvelle exposition de Téhéran en première ligne, constitue à n’en pas douter, un tournant dans le conflit à géométrie variable post 7 octobre, mais bien plus encore, une possible révolution dans la configuration géopolitique du Proche et Moyen Orient.
En effet, au-delà de l’embrasement général, l’entrée de l’Iran sur l’avant-scène du conflit, peut potentiellement conduire à des conséquences inattendues, dont celle évoquée par certains observateurs, à l’instar de Gilles Kepel ; à savoir, un effondrement du régime des mollahs, miné par le doute, à cause de probables infiltrations des services secrets israéliens, au sein même des instances du régime mais aussi par la contestation intérieure massive qui perdure et s’intensifie, nonobstant la répression sanglante exercée par les « gardiens de la révolution ».
Un tel scénario proche de celui de l’effondrement brutal de l’empire soviétique à la fin des années 1980, n’est pour l’heure qu’une hypothèse mais, incontestablement, les évènements récents au sud Liban sont de nature à faire évoluer ce régime, qui une fois de plus, a sans doute plus à perdre qu’à gagner - sur le plan intérieur – d’ un embrasement du conflit avec Israël.
La remise en cause de l’Occident
L’Occident qui croyait, depuis les accords de normalisation d’Abraham, à un retour au calme sinon durable mais à tout le moins facteur de détente au Moyen-Orient, s’est trouvé souvent, contre son gré, en situation de devoir prendre position dans un conflit hautement passionnel et politiquement sensible.
Passée la condamnation unanime des massacres du 07 octobre et l’affirmation du « droit d’Israël à se défendre », la guerre « israélo-palestinienne » ne cesse de provoquer depuis lors, débats, tensions et fractures au sein des populations occidentales, partagées entre le soutien à Israël et la lutte contre le terrorisme islamique, incarné par le Hamas et le soutien à la population civile palestinienne et à la revendication d’un Etat palestinien.
Cherchant à éviter toute importation du conflit « israélo- palestinien » sur leur sol, les Etats occidentaux et principalement européens et d’Amérique du Nord, ont néanmoins dû faire face à une immixtion de cette guerre dans les débats nationaux pour plusieurs raisons.
D’une part, la présence d’une immigration arabo musulmane importante en nombre, qui relaie les revendications palestiniennes et entend peser sur les gouvernements occidentaux.
Pour une partie importante de la communauté musulmane, présente en Occident, la cause palestinienne est devenue le symbole d’une diaspora d’origine arabe pour qui le positionnement vis-à-vis d’Israël constitue un élément prépondérant dans la construction identitaire des immigrés arabo-musulmans.
D’autre part, sur un plan politique, la cause palestinienne est devenue le combat d’une gauche anticoloniale, à l’instar de celle qui en France, avait milité contre la guerre d’Algérie au début des années 1960.
S’appuyant sur des territoires et des populations acquis à la cause palestinienne, le discours politique d’une partie de la gauche occidentale a propulsé cette question dans le débat national, dans les enceintes parlementaires ou dans les médias, en saturant le débat public, notamment durant la période électorale comme cela fût le cas en France en juin et juillet dernier.
Enfin, la charge symbolique du conflit, conduit ce qu’il est convenu d’appeler de manière impropre le « Sud global » - qui constitue dans les faits un front anti-occidental hétérogène - à instruire un procès en colonialisme à Israël qui apparait comme le dernier symbole de l’impérialisme occidental. A cet égard, il est intéressant de souligner le rôle joué par l’Afrique du Sud (36) dans la procédure de saisine de la Cour Internationale de Justice, accusant Israël de violation de la convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948.
Incontestablement l’Occident sort fragilisé de la guerre israélo-palestinienne. En premier lieu, sur le plan intérieur, en faisant face à des divisions au sein de la communauté nationale ainsi qu’en témoignent les manifestations pros palestiniennes de masse, dans certains Etats, comme la Grande -Bretagne ou les manifestations d’étudiants et de militants de la cause palestinienne au sein de certaines universités européennes et américaines. En second lieu, sur le plan extérieur, car nonobstant les déclarations équilibrées des puissances occidentales, l’aide humanitaire déployée en faveur des Gazaouis ou même la reconnaissance officielle de la Palestine, en tant qu’Etat, par l’Espagne, la Norvège ou l’Irlande, la rhétorique anti-occidentale demeure forte et récurrente.
L’apparente impuissance des Etats Unis
Face à cette situation qui place l’Occident, aux yeux d’une partie du monde, en position de quasi-accusé ou de complice d’Israël et face aussi à l’impuissance des instances multilatérales à résoudre ce conflit, nous sommes en droit de nous interroger sur les marges de manœuvre des puissances occidentales.
Côté américain, les autorités semblent avoir théorisé « l’impuissance de la puissance »,
L’administration Biden rappelle le soutien indéfectible à Israël et la reconnaissance de son droit à se défendre et menace, par sa présence militaire dans la région, toute velléité de l’Iran et des mouvements terroristes de s’attaquer frontalement à l’Etat hébreu, sans toutefois engager des actions significatives pour imposer la fin des hostilités.
Autrement dit, Washington dans un exercice d’équilibre diplomatique apparaît à la fois comme un partenaire fidèle d’Israël, tout en sermonnant parfois violemment, l’Etat hébreu, jusqu’à menacer de stopper son aide, lorsque ce dernier commet des actes jugés contraires au droit de la guerre.
Incontestablement, l’agenda électoral des Etats-Unis conduit à cette prudence, chaque camp ne souhaitant pas prendre d’initiative à la veille du scrutin présidentiel. En dépit de ces vicissitudes et atermoiements de l’administration américaine, une constante demeure : le soutien indéfectible de Washington à Israël.
Au lendemain des attaques de missiles balistiques sur Israël depuis l’Iran, les réactions de la classe politique américaine depuis le sommet de l’Etat, en passant par les candidats démocrate et républicain à l’élection présidentielle de novembre prochain, ont toutes réaffirmé un engagement inébranlable pour la sécurité d’Israël.
Dans ce contexte de tension extrême et de confrontation avec l’Iran, la candidate démocrate Kamala Harris, suspectée pour des raisons de politique intérieure, d’être plus en retrait que Donald Trump sur le soutien à Israël et l’intervention des Etas Unis, a déclaré : « nous n’hésiterons jamais à prendre les décisions nécessaires pour défendre les forces et les intérêts américains contre l’Iran et les terroristes soutenus par l’Iran ».
Plus largement si la question Palestinienne est présente dans le débat présidentiel américain, elle ne soulève en aucun cas de divergences majeures entre Démocrates et Républicains, qui se retrouvent sur la nécessité de poursuivre la protection et la sécurité de l’Etat Hébreu, tout en apportant leur soutien à une solution de paix et d’aide humanitaire à Gaza.
En fait, cette proximité de vue n’exclut pas des approches différentes, inspirées notamment par des choix de politique intérieure. Cependant, la nouvelle donne constituée par la confrontation directe entre Israël et l’Iran, place, de facto, les américains dans une situation nouvelle, de nature à percuter le débat présidentiel, surtout si le conflit devait monter en intensité et provoquer une intervention directe des Etats Unis.
A ce titre, le soutien des Républicains à Israël est sous-tendu par une réalité électorale qui oblige le candidat Trump à capter le vote des chrétiens évangéliques très mobilisés sur la défense d’Israël. C’est ainsi que la convention du Parti Républicain a largement fait état de la question des otages israéliens en donnant une tribune à des familles de prisonniers israéliens, venues témoigner de la situation en Israël mais aussi de la montée de l’antisémitisme dans la société américaine.
Côté Démocrates, le soutien à Israël, rappelée par la candidate Harris, repose sur un jeu d’équilibre entre les « classiques », soutiens historiques de l’Etat hébreu, et la nouvelle génération d’élus et d’électeurs, située plus à gauche, qui dénonce les opérations israéliennes dans la bande de Gaza et critique l’aide militaire et financière massive de Washington.
L’effacement de l’Europe
L’effacement de l’Europe tient à l’impossibilité de définir sur le dossier « israélo-palestinien » une position commune. En effet, l’unité des 27 demeure difficile, malgré la concordance des déclarations de soutien et d’affirmation du droit d’Israël à se défendre à la suite des attentats commis par le Hamas. Passé le stade des déclarations, force est de constater des divergences profondes entre les membres de l’Union Européenne illustrées par les décisions contradictoires au lendemain du 7 octobre.
En effet dès le 8 octobre, le Commissaire européen chargé de l’élargissement et de la politique européenne de voisinage, le Hongrois Oliver Varhelyi, annonçait la suspension de l’aide aux Palestiniens, immédiatement démenti par le Haut Représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell et par plusieurs Etats-membres et parlementaires européens.
Au terme de ces atermoiements, c’est finalement « une révision » de l’aide européenne aux Palestiniens qui a été décidée, suivie d’une augmentation de l’aide humanitaire à Gaza, via l’Egypte, sans pour autant que l’Union européenne parvienne à s’imposer comme un potentiel négociateur dans la résolution de ce conflit.
Cependant, l’évolution du conflit et le déplacement de son centre de gravité au sud Liban est de nature à réactiver l’action diplomatique de la France, dans un pays auquel l’attache un lien historique singulier bien que distendu et où elle compte de nombreux ressortissants binationaux et une présence militaire de 700 hommes.
A l’aune de ce « choc » géopolitique, provoqué par le 7 octobre et sans que nous puissions, à cette heure, en mesurer toutes les conséquences pour l’avenir, il est encore plus hasardeux de « penser » les chemins diplomatiques qui conduiraient à la fin de cette séquence de guerre… Impossible, en toute humilité, de se livrer à un exercice de prospective, devant la complexité de la situation et la volatilité des stratégies des acteurs impliqués.
Nous avons plutôt choisi de rappeler ici les solutions évoquées dès le lendemain des massacres du 7 octobre, en démontrant que celles-ci demeurent encore bien illusoires, au regard de la question des territoires et à leurs conditions d’occupation. Et, au-delà, quelle perspective pour la bande de Gaza d’où est parti le conflit actuel… ?
L’illusion de la solution à « deux Etats »
Si nous considérons alors que la problématique territoriale demeure au centre du conflit, le bon sens pourrait conduire à dire, qu’il suffirait alors d’octroyer aujourd’hui aux palestiniens « un chez eux » et donc diviser le territoire….
Aussi vieille que le conflit israélo-palestinien, a été d’abord défendue l’idée de la réunion des deux peuples dans un « Etat unique, fédéral, laïc et démocratique » (37). Il s’est agi, dans cet esprit, d’envisager une cohabitation entre les deux peuples, soit par la création, thèse avancée par le Fatah dans les années 1960, d’un « Etat démocratique arabe pour tous » ou soit, par la fondation d’un Etat « binational », ayant plutôt la faveur, avant même la création d’Israël, des juifs de Palestine.
Il est à préciser que cet Etat fédéral (ou confédération), ainsi imaginé, devrait alors, à l’instar d’autres formules juridiques en vigueur, en Suisse, au Canada ou en Belgique, garantir « une autonomie politique dans chaque groupe et au-dessus, une forme unificatrice (…) seul moyen pour ne pas nier l’identité de chacun » (38) .
Comme le fait observer Gilles DELAFON (39), au regard de la situation figée que nous connaissons, l’Etat dit « binational » aurait tendance à s’imposer dans les faits… : « que se passerait-il en effet si les palestiniens, attestant l’impossibilité d’avoir leur Etat, renonçaient à leur statut de réfugiés et réclamaient les mêmes droits que les Arables israéliens, aujourd’hui deux millions (soit 21 % de la population) ? ».
Il n’en demeure pas moins que le retour des Palestiniens, expulsés en 1948, ne serait pas sans conséquence pour les Israéliens, hostiles à cette revendication. En effet, en « raison de la forte croissance démographique de la population palestinienne, les arabes pourraient devenir majoritaires au sein de l’Etat juif » (40) .
Ces hypothèses seront en tout état de cause, à partir des années 1970, abandonnées au profit de la solution dite « à deux Etats », portée, dans le cadre des différentes négociations menées entre 2009 et 2014, par bon nombre de spécialistes et les instances onusiennes.
La solution « à deux Etats » s’est du reste imposée après la guerre des Six Jours, qui consacre, de fait, la pérennité de la présence de l’Etat hébreu et qui poussera Yasser ARAFAT à reconnaître son existence et son droit à vivre en sécurité, avec « pour contrepartie la légitimation de l’OLP, comme autorité du peuple palestinien ».
Qu’en est-il alors à ce jour d’une telle proposition de sortie de conflit, réactivée, au lendemain du 7 octobre, par les Etats-Unis, la Russie, la Chine ou encore la Ligue Arabe… ?
Cette solution avait d’ailleurs fait l’objet d’un plan de l’ONU dès 1947 et n’ayant pu jamais aboutir, en dépit de multiples négociations. Si l’idée est en effet séduisante, sa mise en œuvre apparaît de plus en plus irréaliste, tant « la défiance entre les deux peuples a atteint des sommets inégalés » (41).
Selon cet ancien journaliste, correspondant à Beyrouth pendant la guerre du Liban, dans les années 1980, il ne sert à rien d’élaborer des scénarios de paix sans tirer des leçons du passé, après plus de sept décennies de guerre » (42) .
Il convient alors, avec lucidité, de reconnaître que les conditions d’établissement d’une paix durable ne sont pas réunies à ce jour, du fait, notamment, du refus des principaux partenaires de se parler réellement, du jeu des grandes puissances, peu disposées à des concessions géopolitiques et plus encore, de l’impossibilité de déterminer les « limites d’un Etat palestinien viable ».
Comme nous l’avons indiqué, la société israélienne a « évacué », sur la période récente, le problème palestinien et plus encore peut-être, une perspective de paix. 35% des israéliens, soit quinze de points de moins en quinze ans, croient encore à une possible « coexistence pacifique ». Par ailleurs, ce sont les plus jeunes israéliens qui se montrent les plus réticents vis-à-vis de la création d’un Etat palestinien : 68 % des 18 – 34 ans rejettent le projet, en écho aux sympathies exprimées en faveur des partis nationalistes religieux (43).
Depuis novembre 2022, Benjamin NETANYAOU est, nous l’avons fait observer, à la tête d’une coalition gouvernementale, associant le Likoud et deux formations nationalistes ainsi que d’une majorité parlementaire, à la Knesset, plutôt hostile à la solution « à deux Etats » et favorable, à l’inverse, à la poursuite du processus de colonisation. Les ministres nationalistes, Itamar BEN-GVIR et Belazel SMOTRICH, défenseurs des colons, en appellent à « l’émigration » de la population de Gaza.
Plus complexe encore, cette position de « fermeté » est globalement partagée par le chef du parti centriste et celui de l’opposition Yair LAPID, ex-Ministre des Affaires étrangères. Autant d’éléments confortant, le recul du « camp de la paix » en Israël, incarné par le Parti travailliste et le Meretz.
Pour l’exprimer plus précisément, face au danger permanent du Hamas, le réflexe « sécuritaire » l’emporte. Le 7 octobre a certainement renforcé ce sentiment et fait de la sécurité d’Israël, la priorité du moment. Si les Israéliens s’interrogent sur la viabilité d’une solution « à deux Etats », les « autorités » palestiniennes, divisées politiquement et territorialement, ne se montrent guère plus volontaristes en ce domaine. Et alors que 63 % des palestiniens approuve la résistance par les armes, « plutôt que la négociation pacifique pour mettre fin à l’occupation » (44), sans que le Hamas, lui-même, fasse l’unanimité chez les Gazaouis. Il n’en demeure pas moins que le Fatah et le Hamas sont, en effet, devenus, depuis les années 2000, de véritables rivaux, se partageant, par ailleurs la gestion des territoires de Cisjordanie, de Gaza et de Jérusalem Est.
Ainsi, le chef de l’Autorité palestinienne, Mahmoud ABBAS, exerçant son pouvoir en Cisjordanie, interlocuteur « officiel » de la diplomatie des Etats-Unis et défenseur de la création d’un Etat palestinien en coexistence avec Israël, s’oppose à la stratégie du Hamas, à la tête d’un « gouvernement palestinien » parallèle, à Gaza, partisan de la destruction de l’Etat hébreu (45) et considérant sa création comme « illégale ».
A cette opposition s’ajoute un climat délétère, au sein même de l’Autorité palestinienne, minée par l’autoritarisme de son chef et d’ailleurs, en dépit des sollicitations des Etats-Unis, peu soutenu par le gouvernement israélien. Cette même Autorité palestinienne, désireuse de reprendre, à l’avenir, le contrôle politique de Gaza, se heurte, aujourd’hui, à la puissance incontournable du Hamas ayant, en quinze ans de présence sur ce territoire, « écarté ou liquidé les opposants, pourchassé les journalistes et verrouillé toutes les structures militaires » (46) .
Très clairement, la « solution à deux Etats » - même si les positionnements des islamistes varient en fonction des circonstances - n’intéresse pas vraiment les leaders du Hamas, témoignant d’abord de leur volonté de peser dans les négociations en cours et à venir… Par conséquent, vouloir « éradiquer » le Hamas militairement ne garantit absolument pas sa disparition politique, au regard de sa popularité acquise, que ce soit en Cisjordanie ou encore au Liban, dans les camps de réfugiés palestiniens.
Pour sûr, il sera donc bien difficile d’envisager des possibilités de « sortie » sans associer toutes les parties prenantes du confit et l’ensemble des organisations en rapport avec la cause palestinienne.
A ce stade, le Premier ministre israélien a, en tout état de cause, manifesté son hostilité à engager un travail diplomatique avec l’actuelle Autorité palestinienne et a affirmé son intention de tout entreprendre pour qu’Israël conserve le contrôle des terres « colonisées ».
A la lumière de l’analyse de la CIA (47), il est pourtant clairement admis que la « manière dont Israël traitera, après la campagne militaire, la bande de Gaza, jouera un rôle déterminant » dans la mise en œuvre de solutions pacifiques… Dans ce climat de guerre, si les grandes puissances défendent, elles aussi, la « solution à deux Etats », ce n’est pas sans difficulté ou, pour certaines, sans arrière-pensée, comme déjà évoqué plus haut. En premier lieu, les Etats-Unis ont de plus en plus de mal à défendre cette issue de sortie, face aux pressions anti-occidentales d’un « Sud global », de plus en plus exigeant vis-à-vis d’Israël, appelé à concéder du terrain aux palestiniens.
Il faut alors reconnaître que la position ferme de l’actuel gouvernement israélien tend à mettre en porte à faux l’administration américaine, notamment, concernant notamment la question de la « colonisation » en Cisjordanie. En attendant, l’enjeu serait sans doute, pour les Etats-Unis, de relancer le processus « d’Abraham », dans le but d’isoler l’Iran et de conclure un accord global avec les pays arabes.
En second lieu, la Russie, bien décidée à ne pas faciliter la tâche aux américains et aux israéliens, semble prendre fait et cause pour le « Sud global » et emboîter le discours « anticolonialiste » en dénonçant le soi-disant « deux poids, deux mesures » (48) des dirigeants occidentaux, entre d’un côté l’appui à l’Israël et d’un autre, le manque d’empathie vis-à-vis des palestiniens. Vladimir POUTINE ménage en réalité les deux parties du conflit, espérant peser sur l’après…. En troisième lieu, la Chine, ayant aussi la prétention de jouer un rôle d’arbitre, souhaite occuper toute sa place de grande puissance.
Enfin, les pays du Golfe sont contraints, comme déjà observé, à un minimum de solidarité vis-à-vis de Gaza et tandis que la Turquie n’a pas vraiment hésité à ériger le Hamas en héroïque résistant… Cependant, au-delà même de ces positionnements géopolitiques, changeants par nature, la solution « à deux Etats » est également rattrapée par la dure « réalité » territoriale…
La dure « réalité » des territoires
Force est de constater en effet, qu’au fil du temps, le territoire dit « palestinien » a été quelque peu morcelé, au point de ressembler à un « archipel » : à savoir, trois entités éclatées que sont la Cisjordanie, Gaza et Jérusalem-Est.
Dans l’absolu, Marie DURRIEU indique très justement que « pour assurer une continuité territoriale en vue de la création d’un Etat palestinien, il faudrait vider les colonies israéliennes » (49) : celles qui ont débuté en Cisjordanie, après l’occupation de 1967 (50) et d’autres qui se sont intensifiées depuis 2012, appelées à bouleverser la composition démographique de ce territoire…
Comme le souligne d’ailleurs Gilles DELAFON (51), les sujets concernant ces implantations en Cisjordanie, le retour des réfugiés ou le statut de Jérusalem, n’ont jamais été tranchés lors des négociations de paix antérieures, notamment dans le cadre des emblématiques accords d’Oslo de 1993. Si la poignée de mains entre ARAFAT, RABIN et PERES a marqué les esprits à cette époque, actant la possible construction d’un avenir commun, « l’arrêt des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie palestinienne n’avait pas été clairement signifié dans l’accord » (52).
En effet, la solution « à deux Etats » s’éloigne, en raison même de la situation en Cisjordanie, dont l’organisation, issue des accords d’Oslo, repose sur une division en zones : des territoires palestiniens autonomes, comprenant des grandes villes (zone A) (53), en voisinage avec d’autres, « sous contrôle » partagé (zone B) et des colonies israéliennes (zone C, soit 60 % de la surface du territoire), gagnant du terrain, qui empêchent de retrouver les frontières de 1967, telles que « promises pour le partage en deux Etats distincts » (54). Ces colonies de la zone C sont d’ailleurs positionnées sur les hauteurs, munies de postes de contrôles contraignant fortement la communication entres les communes palestiniennes.
S’ajoute à ce morcellement, un mur de séparation, construit à l’Est (55) de la ligne verte fixée par l’ONU, issue des accords de 1967, visant à empêcher les attentats-suicides.
Pour rappel, la Cisjordanie « désigne, pour Israël, la Judée-Samarie, en référence aux deux provinces antiques du peuple juif » (56) et demeure un territoire très convoité pour les israéliens. Si les premières terres ont été acquises pour des raisons de sécurité, d’autres conquêtes intègrent, depuis les années 1970, des « terres domaniales » ou des espaces naturels. Cette terre constitue le plus grand des deux territoires palestiniens, ayant été « habité depuis au moins le XVe siècle avant J.-C (…), intégré à l’Empire Ottoman au début du XVIè siècle »(57).
La solution « à deux Etats » supposerait alors un accord global reposant sur des « échanges » de territoires et impliquerait, surtout, l’expulsion de colons « disséminés çà et là » (58). A cet égard, il serait nécessaire de délocaliser des milliers de colons pour déterminer les frontières d’un véritable Etat palestinien. A ce jour, par la voix de son ministre des Finances, Belazel SMOTRICH, le gouvernement israélien n’est pas en mesure d’accepter un tel scénario… Tout au contraire, la poursuite des annexions est devenue un impératif pour des questions de sûreté nationale et ce, d’autant plus, après les attaques du Hamas.
En parallèle, la « résistance » des colons s’organise et plus encore, certains, qualifiés « d’extrémistes », ont entrepris, depuis le 7 octobre, des expéditions violentes afin de conquérir de nouvelles terres, notamment au sein de la zone B (59). Ces colons contrôlent également, comme évoqué, les déplacements des Palestiniens et coupent des routes d’accès, parce que se considérant comme les « souverains de l’Etat d’Israël et de la terre d’Israël » (60).
Pour autant et c’est l’interrogation percutante de Thérèse ANDREVON GOTTSTEIN : peut-on vraiment « qualifier Israël d’Etat colonial (61), pratiquant, pour certaines voix très hostiles à l’égard des israéliens, une forme « d’apartheid » ? Des mots et des qualifications que celle-ci juge bien excessifs. Elle précise en outre que si Israël, après la guerre des Six Jours, était désigné comme l’occupant d’une terre destinée aux palestiniens, ils sont devenus, peu à peu, des « colonisateurs ». Or, pour être précis, le projet sioniste n’a pas vraiment de point commun avec les processus historiques de colonisation que nous avons connu par ailleurs, c’est-à-dire la « conquête d’un pays par un Etat, sans que ce dernier n’ait jamais eu de liens ancestraux ou historiques avec lui ».
Le sionisme, né en Russie, ne relève pas en effet de cette logique mais plutôt d’un idéal consistant d’abord « à faire renaître la langue hébraïque, de préserver la culture juive et de sauver la nation juive, menacée par la persécution ou l’assimilation ». Les pionniers ont choisi une terre « enracinée dans l’âme juive, où des communautés avaient continué à vivre durant des siècles ». Autrement dit, ces « futurs israéliens », ayant vécu sous l’Empire Ottoman et le mandat britannique, n’avaient pas pour but de « convertir » les arabes ou de leur imposer leur culture mais bien de « cultiver cette terre qu’ils considéraient comme le seul lieu où le peuple juif pouvait vivre libre ».
La guerre de 1948 a certes généré des déchirements et entraîné des mouvements de réfugiés mais elle ne fait pas d’Israël « un résidu de la période colonisatrice au Moyen-Orient », supposant, pour la conclusion d’une paix durable, la disparition de l’actuel Etat Hébreu et le « départ de 7 millions de juifs israéliens » …
Si la Cisjordanie est un foyer de tensions ancestrales, constituant autant d’obstacles à la résolution du conflit, la situation de la bande de Gaza pose aussi question…, autre enjeu depuis sa création en 1949. Territoire, à l’instar de la Cisjordanie, « dominée », au fil de plus de 5 siècles d’histoire, « par de nombreux peuples et empires différents » (62), est, depuis 2007, le théâtre, sans fin, de conflits et de crises géopolitiques.
D’une surface 360 km², celui-ci, se situant dans la dépendance économique d’Israël (63), est découpé en cinq districts : le Nord, Gaza, le Centre, Khan Younis et Rafah. Peuplé de 1,9 millions d’habitants, les deux tiers de ceux-ci sont des réfugiés palestiniens ou des « déplacés », répartis dans différents camps administrés par l’ONU. Si Israël a bien démantelé en 2005 ses propres installations militaires, l’Etat hébreu « continue de contrôler », non sans faille, comme déjà indiqué, « les frontières terrestres, les eaux territoriales maritimes, le cyberespace, les télécommunications et l’espace aérien de la bande de Gaza ». (64)
Face à cette situation et alors que ce territoire était, jusqu’au 7 octobre, considéré comme une « terre palestinienne », le Hamas, intensifie, depuis 2018, ses actions violentes, le long de la clôture de sécurité entre Gaza et Israël, ayant engendré la mort de palestiniens et de soldats israéliens.
Là encore, la solution « à deux Etats » se heurte à la géographie et à la réalité d’un territoire « coincé entre Israël au nord et l’Egypte au sud, sans réelle viabilité économique (…) » (65). A l’absence « de continuum géographique s’ajoute en effet l’étranglement économique évident » de cet Etat palestinien hypothétique, censé coexister avec l’Etat hébreu. En clair, la création d’un Etat palestinien bute sur la domination d’Israël, « qu’il s’agisse de la monnaie, des recettes fiscales, des canaux commerciaux, de l’énergie, de l’accès aux ressources ou des marchés du travail ».
Dès lors et rejoignant en cela les tenants du pragmatisme, Gilles DELAFON nous invite « à dépasser les solutions » toutes faites pour mieux « penser la paix » sur le long terme.
Quelle « coexistence » pacifique ?
Force est de constater, en effet, qu’après un an de conflit intense entre Israël et le Hamas, aucun plan de sortie acceptable n’apparaît vraiment. Il convient alors d’affronter le réel et d’envisager l’avenir avec beaucoup de modestie, en s’armant de patience…
Si la solution ne peut venir des acteurs du conflit eux-mêmes, elle pourrait émerger, sans doute, de l’extérieur afin de peser sur les enjeux et de faire valoir l’intérêt géopolitique d’une « coexistence » pacifique dans cette partie du monde. A l’évidence et au regard des échecs diplomatiques successifs, la résolution du conflit semble bloquer autour deux éléments majeurs :
- la question, nous l’avons évoqué, des « colonies », dont l’implantation est censée « pérenniser la présence juive sur au moins une partie de la Cisjordanie » (66),
- et bien entendu, le statut de Jérusalem, reconnue comme la vraie capitale par les deux peuples.
Henri KISSINGER faisait remarquer, en 2014, à propos de la question palestinienne, que « peu de sujets ont inspiré autant de passion que la tentative pour concilier les exigences de sécurité et d’identité d’Israël, les aspirations des Palestiniens à l’autonomie et la recherche par les gouvernements arabes voisins d’une politique compatible avec l’analyse qu’ils faisaient de leurs impératifs historiques et religieux » (67).
Il est clair qu’au moins deux générations d’arabes ont acquis la conviction que l’Etat « impérialiste » d’Israël avait usurpé le patrimoine territorial musulman, empêchant - et ce n’est pas la seule raison à l’évidence - d’aboutir, dès 1947 d’ailleurs, à la constitution de deux Etats distincts et souverains, selon les principes westphaliens (68). Et tandis qu’au sein même des territoires palestinien (Gaza), libanais et syrien, la doctrine du djihad s’est propagée et a bien comme impératif, relayé, notamment, par l’Iran, de mettre fin à « l’occupation sioniste ».
Le grand conseiller diplomatique américain de Richard NIXON et de Gérald FORD indique qu’il est possible de distinguer trois types de points de vue arabes :
- un petit groupe qui accepterait une « coexistence » avec Israël et sur lequel il faudrait, en toute logique, s’appuyer pour avancer dans la construction d’une paix souhaitable,
- un groupe beaucoup plus important qui cherche à « détruire Israël par un affrontement permanent »,
- et d’autres, plutôt favorables à la négociation, envisagée « comme un « moyen de triompher, par étapes, de l’Etat juif ».
D’un autre côté, Israël, territoire étroit, comptant une population plus faible que ses voisins, privilégie, dans les phases de répit, des positions légalistes, ne voulant en rien céder sur les terres dites « occupées ». Plus encore, il s’agit pour les israéliens d’inclure, dans tout accord de paix, une reconnaissance « morale et juridique » du territoire juif.
C’est-à-dire faire accepter aux musulmans « l’existence religieuse et territoriale » de l’Etat Hébreu. Autant dire qu’un blocage réel perdure dans cet espace stratégique, conditionnant, pour partie au moins, « l’ordre régional et mondial ».
A ces considérations, s’agrège l’opposition ancestrale sunnite - chiite qui neutralise, dans ce contexte et sur fond de profondes rivalités politiques, l’Arabie Saoudite et l’Iran.
En ce sens, l’Arabie Saoudite et Israël ont un intérêt commun : celui de retarder, voire d’anéantir, le programme de développement nucléaire militaire iranien.
Plus globalement et en y rajoutant une dose de complexité, le conflit « israélo-palestinien » et dans une acceptation plus large, « israélo-arabe », met en lumière deux conceptions de l’ordre mondial : celui de l’ordre « occidental », sur lequel repose la fondation de l’Etat d’Israël et celui de la « conscience islamique », contestant, pour résumer, la domination du « camp » des Etats-Unis et de leurs alliés historiques.
Comment alors faire « coexister », dans un territoire aussi limité, situé entre Jourdain et Méditerranée, « deux concepts de l’ordre mondial » (69), incarnés par deux peuples distincts vivant, à la fois, côte à côte et souvent, face à face ? Autre interrogation : comment donner à certains territoires palestiniens et qualifiés comme tels, les « attributs de la souveraineté » ?
C’est précisément le débat qui s’instaure sur l’avenir à long terme de la bande de Gaza, à l’issue du conflit…
A ce stade, le Premier ministre israélien envisage de renforcer le contrôle de la frontière entre Gaza et l’Egypte et de toute la « zone à l’Ouest de la Jordanie » (70), impliquant aussi l’instauration d’une « zone tampon de sécurité » avec Israël ainsi qu’une démilitarisation et un changement de d’administration de l’enclave. Ce plan est d’ores et déjà rejeté par l’Autorité Palestinienne, jugeant que ce processus viserait à « une réoccupation de la bande de Gaza » - perspective d’ailleurs également non retenue par les Etats-Unis - et de « bloquer la création d’un Etat palestinien ».
La question divise également le gouvernement israélien, entre la position du Ministre de défense, partisan d’une administration palestinienne à Gaza, relayée par des acteurs internationaux et le bloc « nationaliste », excluant cette hypothèse, au moins dans l’immédiat. La paix ne pourra pas néanmoins se frayer une voie sans la « redynamisation » d’une Autorité Palestinienne qu’il s’avèrera cependant nécessaire de relégitimer, condition absolue pour l’Etat Hébreu, convaincu que celle-ci a « soutenu et financé le terrorisme », toutes ces dernières années.
Cette option permettrait alors de retrouver les conditions d’une certaine stabilité, que ce soit à Gaza ou en Cisjordanie, territoires occupés, selon le droit international… Si rendre la vie plus facile aux palestiniens permettrait sans doute de tarir, à la source, le terrorisme islamiste, encore faudrait-il que les Israéliens puissent engager une négociation saine avec des interlocuteurs qui manifestent une réelle intention de négocier.
En attendant, pas d’autre choix que de faire preuve d’un réalisme sans concession, seule manière de se donner encore des raisons d’espérer….
Philippe MOCELLIN et Philippe MOTTET, le 3 octobre 2024
NOTES ET REFERENCES ACADEMIQUES
1 à 5 [8]
6 à 13 [9]
14 à 20 [10]
21 à 28 [11]
29 à 38 [12]
39 à 50 [13]
51 à 59 [14]
60 à 70 [15]
Mots-clés
sécurité et libertésouveraineté
Union européenne
crise
humiliation
économie et histoire
géopolitique
Guerre
gouvernance
Institutions
puissance
régionalisation
Relations internationales
Technologies
Moyen-Orient
Russie
Chine
Etats-Unis
Europe
France
Israël
Gaza
Iran
Notes
[1] Docteur en Science Politique, Maître de Conférences Associé à l’Université de Poitiers de 2013 à 2019. À ce jour, Directeur Général des Services d’une collectivité locale
[2] Docteur en Droit. Avocat et Maire honoraire d’Angoulême, assure des enseignements de géopolitique à l’Université de Poitiers
[3] « Introduction à la géopolitique, en 50 fiches », Ellipses, 2019, d’un essai politique, « Le monde des possibles, comment réconcilier les peuples avec la mondialisation ? » VA Editions, 2020 et de contributions parues dans Géopoweb, « De la fragmentation à l’installation d’un désordre mondial » I et II, septembre 2023
[4] Josepha Laroche, La brutalisation du monde. Du retrait des Etats à la décivilisation. Juillet 2016. L’Harmattan
[5] Le Monde du 22 sept.
[6] France Info, 18 sept.
[7] C’est-à-dire, en ces circonstances précises : des meurtres et des sévices perpétrés, par des combattants du Hamas - organisation « administrant » la bande de Gaza -, contre des civils, au sein du kibboutz de Kfar Aza, dans le sud d’Israël. Les faits parlent d’eux-mêmes et alors que nous connaissons désormais la nature des actes de violence commis, les violences sexuelles que certaines jeunes filles ont subies ainsi que les formes de mises à mort pratiquées…
[8] (1) Le mouvement chiite avait abandonné, pour des raisons de sécurité, les téléphones portables, au bénéfice de ces appareils sans fil, fonctionnant par l’intermédiaires de signaux radio. Selon les experts en cybersécurité, les explosions des bipeurs et des talkies-walkies, résultent de l’installation, au cours de la chaîne d’approvisionnement, de charges explosives dans les appareils en question. Les explosions ont été alors déclenchées « à la réception d’un message particulier », Cf. observers.france24.com, septembre 2024
(2) Les frappes récentes de l’armée israélienne ont provoqué la mort de plusieurs responsables du Hezbollah.
(3) Nous invitons nos lecteurs à consulter Georges BENSOUSSAN, Les origines du conflit israélo-arabe (1870 – 1950), Que sais-je ? Humensis, 2023 et bien d’autres ouvrages, notamment, Nadine PICAUDOU, Les Palestiniens, un siècle d’histoire, Editions Complexe, 2003
(4) « Au IIIe millénaire, la région est sous la domination de cités-Etats cananéennes (…) A partir de 1500 av. J.-C, les villes cananéennes sont conquises et deviennent vassales du Nouvel Empire égyptien durant près d’un demi-millénaire. C’est durant cette période que les premiers israélites s’installent (…). Les israélites ne seraient donc pas une population étrangère au pays de Canaan, mais le résultat d’une transformation progressive interne d’une partie de la société cananéenne (…) Vers 900 av. J.-C émerge le royaume d’Israël (…) » Cf. Baptist CORNABAS, Parlons géopolitique, Larousse, 2019
(5) En 1914, la future Palestine « mandataire » (englobant l’actuel Etat hébreu, la Cisjordanie et la bande de Gaza), confiée, en 1922, à la Grande Bretagne par la Société des Nations, comptait 720 000 habitants, dont 80 000 juifs.
[9] (6) Les juifs et les chrétiens sont soumis au statut dit de « dhimmis », en référence au droit musulman, accordant aux minorités confessionnelles, une protection de leur vie, de leurs biens et la liberté de pratiquer leur religion, en échange du paiement d’un impôt, nommé « djjzîa » et d’une loyauté envers l’Etat
(7) Cf. Georges BENSOUSSAN, op. cit., 2023
(8) Cf. Baptist CORNABAS, op. cit.
(9) Charte de l’OLP référencée par Baptist CORNABAS, op. cit.
(10) Les conditions posées sont, d’un côté, le renoncement par les Palestiniens du recours à la violence et d’un autre, le gel de la politique d’implantations juives en Cisjordanie. Restera lettre morte…
(11) Les villes d’Ariel, Beitar Illit, Maale Adunium et Modiin Illit rassemblent 200 000 habitants, représentant la moitié des colons de Cisjordanie
(12) Cf. diploweb.com, op. cit, Août 2024
(13) Cf. diploweb.com, op. cit, Août 2024
[10] (14) Le journal israélien Yediot Aharonot soutient cependant, bien que démenti par le Premier ministre Benjamin NETANYAHOU, que les services de renseignements égyptiens avaient averti, quelques jours avant l’attaque, leurs homologues israéliens que le Hamas « préparait quelque chose d’énorme ». Cf. Yvonnick DENOEL, Les guerres secrètes du Mossad, Nouveau monde, 2024
(15) Cf. Yvonnick DENOEL, op.cit. retraçant l’histoire des services du Mossad, de ses réseaux internationaux et de son rôle dans la défense de l’Etat hébreu. Créé en décembre 1949, ce service de renseignement est en effet « utilisé comme un outil de survie d’Israël ». Souvent mis à contribution dans l’élimination physique de cadres politiques, de militaires et de scientifiques de pays hostiles ou issus d’organisations terroristes, il est le « couteau suisse » du renseignement, impliqué dans multiples opérations spéciales (exfiltrations, diplomatie secrète avec des Etats arabes…)
(16) Précédée par des lancements de drones en direction des tours de Tsahal, à proximité de la frontière de Gaza dans le but d’empêcher tout signal d’alerte
(17) Plus d’une centaine encore détenue par le Hamas à ce jour, dont 34 personnes déclarées mortes par l’armée israélienne (le 20 août dernier, 6 corps ont été récupérés dans la bande de Gaza, retenus ensemble dans un tunnel)
(18) Cf. les témoignages recueillis, dans les « deux camps » (survivants du 7 octobre, proches d’otages et habitants de Gaza) par Benoît CHRISTAL et Gallagher FENWICK, 7 octobre 2023, Israël et Gaza, L’affrontement des tragédies, Editions du Rocher, 2024
(19) Cf. Erwan DAVOUX, Le 7 octobre, choc géopolitique plus que choc des civilisations, marrianne.net/agora / tribunes-libres, novembre 2023
(20) Cf. Marie DURRIEU, diploweb.com/ Comment comprendre le conflit israélo-palestinien ? Août 2024 et auteur de l’ouvrage Du conflit israélo-palestinien au nucléaire iranien : l’humiliation, la variable oubliée des négociations, Editions l’Harmattan, 2021
[11] (21) « L’organisation d’une rave-party », près du Kibboutz Re’im, « à 6 kilomètres de Gaza illustre, d’une certaine manière, ce déni ambiant ». Cf. diploweb.com, op.cit. 2024
(28) Autant d’informations provenant de « sources ouvertes », accessibles en ligne, sur les réseaux sociaux et susceptibles d’être utilisées par tout palestinien « venant chaque jour travailler en Israël » cf. Yvonnick DENOEL, op. cit., 2024, p. 417
(23) Oded AILAM, ancien responsable du Mossad, indique à cet égard que « les principaux responsables du Hamas ont passé des années dans nos prisons. Ils parlent hébreu, ils regardent notre télévision, ils lisent nos journaux (…) » cf. op.cit.2024
(24) Cf. op.cit., 2024
(25) Cf. les excuses publiques du général de division Aaron HALIVA, lors de la passation de pouvoir au quartier général de l’Aman, le 21 août 2024
(26) Ronen BERGMAN, Adam GOLDMAN, « Israël knew Hamas’s attack plan more than a year ago », New York Times, 30 novembre 2023, cité par Yvonnick DENOEL, op. cit.
(27) Cf. Nitsana DARSHAN – LEITNER, Samuel, M. KATZ, Harpoon, Inside the covert war against terrorism’s money masters, Hachette Books, 2017
(28) Op.cit., 2024, p. 425
[12] (29) L’armée israélienne a annoncé avoir libéré, en juin dernier, 4 otages, enlevés, le 7 octobre, par le Hamas, sur le site du festival electro Nova et le 27 août, un autre otage, Kaid FARHAN ALKADI, qui travaillait comme vigile au kibboutz Magen, lors « d’opérations complexes », menées au centre et dans le sud de la bande de Gaza
(30) Israel – Palestine 16.08.2024 www.unicef.fr
(31) « Counting the dead in Gaza : difficult but essential » www.the lancet.com 05.07.2024
(32) Le 22 septembre 2024, la chaîne de télévision qatarie Al-Jazira a annoncé que des militaires israéliens avaient pris possession de ses bureaux à Ramallah, en Cisjordanie occupée et émis un ordre de fermeture de 45 jours
(33) Ligne tracée en juin 2000 par l’ONU après le retrait israélien du Liban
(34) Gilles KEPEL, Holocaustes, Plon, 2024
(35) Louis Imbert, Le Monde, le 28 mars 2024
(36) Amérique du Sud, membre des BRICS
(37) Cf. Lou Inès BES, « Etat fédéral, unique, binational… Ces pistes oubliées dans le conflit entre Israël et la Palestine », francetvinfo.fr, décembre 2023
(38) En référence au mouvement citoyen israélo-palestinien « A Land for All » visant à faire appliquer des droits sociaux et politiques pour tous et à permettre la libre circulation des travailleurs israéliens et de palestiniens dans les différents territoires.
[13] (39) Cf. Gilles DELAFON, Israël-Palestine : l’impossible solution à deux Etats, Institut Thomas MORE, note 65, février 2024
(40) Cf. Baptist CORNABAS, op. cit., p. 77
(41) Cf. Gilles DELAFON, op.cit., 2024
(42) Cf. Henry LAURENS, « Le problème israélo-palestinien était encore soluble en 1990, il ne l’est plus », Le Figaro, octobre 2023, cité par Institut Thomas MORE, op. cit., 2024. Spécialiste du monde arabe, celui-ci fait un constat peu optimiste : « les israéliens ne peuvent voir dans les palestiniens leur propre mort » et réciproquement…
(43) S’ajoute à cette tendance, le vote des jeunes russophones, nés en Israël, arrivés en âge de voter en 2022, favorables au leader du Mafdal, parti sioniste religieux, Belazel SMOTRICH, ayant grandi à Bet El, colonie juive en Cisjordanie et qui n’est pas loin de penser que l’idée même de « peuple palestinien » relève d’une « invention »
(44) Cf. Marwan MUASHER, Foreign Affairs, janvier 2024, cité par Gilles DELAFON, op. cit.
(45) Tenant compte des résultats des législatives de 2006, le chef de l’Autorité palestinienne avait fait d’Ismail HANIYEH, leader du Hamas, son Premier ministre.
(46) Cf. Gilles DELAFON, op. cit., 2024
(47) Cf. 2024, l’année de toutes les menaces vues par la CIA, op.cit.
(48) Cf. Guerre Israël-Hamas : Riyad dénonce le « deux poids, deux mesures » de la communauté internationale, L’Orient-Le Jour, novembre 2023
(49) Cf. Marie DURRIEU, diploweb.com, op. cit.
(50) L’arrivée au pouvoir de Menahem BEGIN en 1977 a favorisé cette colonisation, au travers de l’installation des juifs orientaux, population, jusqu’alors, oubliée au profit des Ashkénazes, originaires d’Europe centrale.
[14] (51 ) Op. cit., 2024
(52) Constat du négociateur israélien Yossi BEILIN
(53) 2,8 millions de palestiniens vivent dans ce territoire occupé par Israël depuis 1967
(54) Cf. francetvinfo.fr, op. cit, 2023
(55) Le tracé de ce mur intègre plusieurs colonies israéliennes, actant officiellement, en dépit de la condamnation de l’ONU, l’intention de « conserver à terme les implantations juives en Cisjordanie et d’en annexer 10 % du territoire » Cf. Baptist CORNABAS, op. cit.
(56) Cf. Fabien MAGNENOU, francetvinfo.fr, novembre 2023
(57) Cf. 2024, l’année de toutes les menaces vues par la CIA, op.cit., p.173 à 181. Se reporter ici aux principaux chiffres repères de ce territoire, situé à l’ouest de la Jordanie et à l’est d’Israël, à savoir :
- 5 860 km², comprenant, en 2023, une population de 3 176 549 d’habitants
- tourné vers la production agricole (olives, volailles, lait…)
- dont 18 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté
(58) Op. cit., 2024
(59) Dans la nuit du 15 au 16 août 2024, une centaine de colons, armés, a incendié, dans le village de Jit entre Naplouse et Qalqiliya, des maisons et des voitures, faisant un mort et un blessé grave : des attaques condamnées par l’ONU, les Etats-Unis et aussi par le gouvernement israélien
[15] (60) Déclaration de Daniella WEISS, figure du mouvement de colonisation, cité par Fabien MAGNENOU, op. cit.
(61) Cf. « Qualifier Israël d’Etat colonial est inexact et dangereux », La Croix, juillet 2024
(62) Cf. 2024, l’année de toutes les menaces vues par la CIA, op.cit., p.163 à 172
(63) Après l’installation au pouvoir du Hamas dans la bande de Gaza, les forces israéliennes ont pratiqué un « blocus » à l’égard de ce territoire, considéré comme « ennemi », non sans conséquence économique, toutes ces dernières années : un PIB en baisse et un taux de chômage élevé, notamment chez les 15- 24 ans.
(64) Op.cit., 2024
(65) Cf. Gilles DELAFON, op. cit., p. 23, 2024
(66) Cf. Baptist CORNABAS, op. cit.
(67) Henri KISSINGER, L’ordre du monde, Fayard, 2024, p. 127
(68) Cf. Philippe MOCELLIN, Le multilatéralisme en question, Géopoweb, janvier 2021,
(69) Henri KISSINGER, op. cit, p. 130
(70) Cf. RFI.fr, février 2024
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